FRÉDÉRIC DUSSAULT, FRANK VITARO, MARA BRENDGEN, MICHEL BOIVIN, JEAN R. SÉGUIN, GINETTE DIONNE /
Frank Vitaro, Professeur titulaire (Psychoéducation), Université de Montréal
Mara Brendgen, Professeure titulaire (Psychologie), Université du Québec à Montréal
Michel Boivin, Professeur titulaire (Psychologie), Université Laval
Jean R. Séguin, Professeur titulaire (Psychiatrie), Université de Montréal
Ginette Dionne, Professeure titulaire (Psychologie), Université Laval
Correspondance : Frank Vitaro, Professeur titulaire (Psychoéducation), Université de Montréal – GRIP, 3050 boul. Edouard-Montpetit, Montréal (QC), Canada H3T 1J7, Courriel : frank.vitaro@umontreal.ca
Remerciements : Nous tenons à remercier le Fonds québécois de recherche sur la société et la culture (FRQSC), les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ainsi que le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) pour leur aide financière. Nous aimerions également remercier les familles, les enseignantes et les assistants de recherche qui ont participé aux diverses cueillettes de données.
Résumé
L’objectif de cette étude est triple : 1- déterminer le nombre, la forme et le degré de chevauchement des trajectoires types de participation à des jeux de hasard et d’argent (JHA) et de consommation de substances psychotropes (SUP) chez un échantillon de jumeaux au début de l’adolescence ; 2- vérifier les ressemblances et les différences au niveau de l’architecture génétique et environnementale des trajectoires de JHA et de SUP ; 3- déterminer la présence de facteurs de risque associés de manière prédictive aux trajectoires simples ou mixtes de JHA et de SUP. L’échantillon final est composé de 213 (122 paires monozygotes et 91 paires dizygotes de même sexe) paires de jumeaux élevés au sein de la même famille. Les données relatives aux JHA et aux SUP ont été recueillies à 13, 14 et 15 ans à l’aide d’instruments de mesure autoadministrés. Les données relatives aux facteurs de risque touchent un facteur d’ordre personnel (c.-à-d., impulsivité) et des facteurs d’ordre familial mesurés à la préadolescence. Des analyses de trajectoires ont permis de dégager deux trajectoires de participation aux JHA et deux trajectoires de consommation de SUP. Des analyses génétiquement informatives ont permis, par ailleurs, de montrer que les trajectoires de participation à des JHA et de consommation de SUP sont majoritairement sous contrôle génétique. Finalement, des analyses de régression ont révélé des différences au plan des variables associées de façon prédictive aux trajectoires simples ou mixtes de JHA et de SUP. Ces résultats sont abordés à la lumière des changements dans le DSM-V qui établissent un rapprochement entre les problèmes de JHA et les problèmes de SUP.
Mots-clés : jeux de hasard, psychotropes, génétique, trajectoires, adolescence
The overlap between gambling and psychotropic drug consumption trajectories in early adolescence : a longitudinal genetically informative study
Abstract
This study has a triple objective : 1- To determine the number, form and degree of overlap of typical trajectories of participation in gambling and the consumption of psychotropic substances among a sampling of twins at the beginning of adolescence ; 2- To verify the similarities and differences in regard to the genetic and environmental architecture of the gambling and psychotropic substance consumption trajectories ; 3- To determine the risk factors associated, in a predictive manner, with single or mixed trajectories of gambling and drug consumption. The final sampling was composed of 213 pairs of twins (122 monozygotic pairs and 91 dizigotic pairs of the same sex) raised in the same family. The data concerning gambling and drug consumption was gathered at the ages of 13, 14 and 15 years using self-administered measurement tools. The data concerning risk factors affected personal factors (that is, impulsiveness) and family factors measured at pre-adolescence. Analysis of the trajectories indicated two trajectories concerning participation in gambling and two concerning consumption of psychotropic substances. Genetically informative analyses also demonstrated that the trajectories concerning participation in gambling and consumption of psychotropic substances are mainly controlled by genetics. Lastly, analyses of regression revealed differences in the variables associated in a predictive manner to the single or mixed trajectories of gambling and psychotropic substance consumption. These results are considered in the light of changes in the DSM-V which establish a relation between problems involving gambling and the consumption of psychotropic substances.
Key words : gambling, psychotropic substances, genetics, trajectories, adolescence
Traslapo de las trayectorias de juego y las trayectorias de consumo de psicotrópicos al comienzo de la adolescencia : un estudio longitudinal genéticamente informativo
Resumen
Este estudio tiene un triple objetivo : 1) Determinar la cantidad, la forma y el grado de traslapo de las trayectorias tipo de participación en los juegos de azar y de dinero y el consumo de sustancias psicotrópicas en una muestra de mellizos al comienzo de la adolescencia ; 2) Verificar las semejanzas y las diferencias en el nivel de la arquitectura genética y ambiental de los juegos de azar y de dinero y el consumo de sustancias psicotrópicas ; 3) Determinar la presencia de factores de riesgo relacionados de manera predictiva con las trayectorias simples o mixtas de los juegos de azar y de dinero y el consumo de sustancias psicotrópicas. La muestra final está compuesta por 213 pares de mellizos (122 pares de monocigotas y 91 pares de dicigotas) del mismo sexo criados en el seno de la misma familia. Los datos relativos a los juegos de azar y de dinero y el consumo de sustancias psicotrópicas se obtuvieron a los 13, 14 y 15 años por medio de instrumentos de medición auto administrados. Los datos relativos a los factores de riesgo comprenden un factor de orden personal (es decir, impulsividad) y factores de orden familiar medidos en la preadolescencia. Los análisis de las trayectorias permitieron destacar dos trayectorias de participación en los juegos de azar y de dinero y en el consumo de sustancias psicotrópicas. Análisis genéticamente informativos permitieron, por otra parte, mostrar que las trayectorias de participación en los juegos de azar y de dinero y en el consumo de sustancias psicotrópicas están en su mayoría bajo control genético. Finalmente, los análisis de regresión revelaron diferencias en el plano de las variables relacionadas de manera predictiva con las trayectorias simples o mixtas de los juegos de azar y de dinero y del consumo de sustancias psicotrópicas. Se llega a estos resultados a la luz de los cambios realizados en el manual DSM.5, que establecen un acercamiento entre los problemas de juegos de azar y de dinero y los de consumo de sustancias.
Palabras clave : juegos de azar, psicotrópicos, genética, trayectorias, adolescencia.
Introduction
Les études de prévalence menées auprès des adolescents nous renseignent sur le nombre de jeunes qui consomment des substances psychotropes (consommation de SUP) ou qui participent à des jeux de hasard et d’argent (participation à des JHA) à divers âges. Elles ne nous indiquent toutefois pas comment la consommation de SUP et la participation à des JHA évoluent à travers l’adolescence ni si cette évolution est uniforme ou variable selon les adolescents. Dans la même veine, les études de prévalence permettent de déterminer le degré de cooccurrence entre la consommation de SUP et la participation à des JHA à un temps précis. Elles ne permettent pas de vérifier le degré de chevauchement à travers les années. De plus, les études de prévalence permettent de vérifier quels facteurs sont associés à la consommation de SUP ou à la participation à des JHA. Elles ne permettent toutefois pas de déterminer si ces facteurs précèdent ou accompagnent la consommation de SUP ou la participation à des JHA. Bref, malgré leur utilité sur le plan épidémiologique, les études de prévalence souffrent de certaines limites qui peuvent être compensées dans des devis prospectifs longitudinaux. Par ailleurs, une étude de prévalence qui inclut un seul enfant par famille, qu’elle soit transversale ou longitudinale, ne permet pas de déterminer si l’évolution, possiblement parallèle, de la consommation de SUP et de la participation à des JHA est d’origine environnementale ou d’origine génétique. Pour cela, nous avons besoin d’une étude génétiquement informative.
Le premier objectif de la présente étude consiste à déterminer le nombre, la forme et le degré de chevauchement des trajectoires types de participation à des jeux de hasard et d’argent (JHA) et de consommation de substances psychotropes (SUP) chez un échantillon de jumeaux au début de l’adolescence (entre 13 et 15 ans). Le second objectif vise à vérifier les ressemblances et les différences au niveau de l’architecture génétique et environnementale des trajectoires de JHA et de SUP ; une telle vérification repose sur l’utilisation d’un devis de jumeaux. Finalement, le troisième et dernier objectif vise à déterminer si certaines variables d’ordre personnel, habituellement associées à la consommation de SUP ou à la participation à des JHA, caractérisent aussi les adolescents cheminant sur des trajectoires élevées de JHA et de SUP. Par exemple, l’impulsivité est un facteur de risque reconnu en regard de la consommation de SUP et de la participation à des JHA. En conséquence, ce facteur de risque, lui-même hautement « héritable » (Bezdjian, Baker, & Tuvblad, 2011) devrait, selon un principe de « dosage effet », distinguer les adolescents cheminant sur des trajectoires élevées de JHA et de SUP de ceux qui cheminent sur une trajectoire élevée de JHA ou de SUP.
Profils développementaux (c.-à-d. trajectoires)
Déjà à 13 ans, un peu plus du quart des adolescents québécois ont participé à des JHA (ex. : jeux de cartes et paris sportifs) ou ont consommé des substances psychotropes comme l’alcool ou le cannabis (Pica et al., 2012). Ces proportions augmentent rapidement au cours de l’adolescence, mais pas nécessairement de manière uniforme pour tous les adolescents, entraînant la possibilité et la nécessité d’identifier des sous-groupes marqués par des trajectoires distinctes. L’exercice d’identifier des joueurs ou de jeunes consommateurs réguliers ou en croissance au début de l’adolescence est important étant donné qu’une consommation précoce de SUP ou une participation précoce à des activités de JHA sont annonciatrices de problèmes ultérieurs (Anthony & Petronis, 1995 pour la consommation précoce de SUP ; Rahman et al., 2012 pour la participation précoce à des JHA). Par conséquent, il s’avère essentiel de connaître les jeunes qui cheminent sur des trajectoires précoces ainsi que les facteurs de risque associés de manière prédictive avec ces trajectoires afin de bien planifier les efforts de prévention et d’élaborer un modèle étiologique cohérent (Vitaro, 2009).
Plusieurs études ont examiné le nombre et la forme des trajectoires type de consommation de SUP à l’adolescence (Guo et al., 2002 ; Tucker, Ellickson, Orlando, Martino, & Klein, 2005 ; Wanner, Vitaro, Ladouceur, Brendgen, & Tremblay, 2006). Selon la période couverte (ex. : début de l’adolescence vs toute l’adolescence et le début de l’âge adulte) et du type de substance considérée (ex. : alcool vs plusieurs substances sans distinction), ces études rapportent entre deux et six trajectoires distinctes. Contrairement aux nombreuses études sur les trajectoires types de consommation de SUP à l’adolescence, une seule étude, à notre connaissance, a examiné les trajectoires types de JHA. Cette étude de Vitaro et de ses collaborateurs (Vitaro, Wanner, Ladouceur, Brendgen, & Tremblay, 2004) rapporte trois trajectoires types à travers l’adolescence : une trajectoire précoce-élevée, une trajectoire moyenne et une trajectoire basse. Toutefois, les résultats de cette étude sont difficilement généralisables puisqu’ils ont été recueillis auprès d’un échantillon de garçons de milieux défavorisés. De plus, un seul item a servi à évaluer la participation annuelle à des JHA. Par conséquent, le nombre et la forme des trajectoires types de JHA établies à l’aide d’instruments validés auprès d’un échantillon représentatif d’adolescents demeurent inconnus.
Chevauchement entre consommation de SUP et participation à des activités de JHA
La moitié des joueurs pathologiques éprouvent aussi des problèmes de consommation d’alcool ou de drogue (Pietrzak, Morasco, Blanco, Grant, & Petry, 2007). Une cooccurrence élevée existe aussi entre la participation à des JHA et la consommation de SUP à l’adolescence (Barnes, Welte, Hoffman, & Tidwell, 2009 ; Vitaro, Brendgen, Ladouceur, & Tremblay, 2001 ; Winters & Anderson, 2000). L’examen de cette cooccurrence, tant chez les adultes que chez les adolescents, se limite toutefois largement à un seul temps de mesure. Ceci est particulièrement un problème à l’adolescence en raison, tel que déjà noté, de l’augmentation rapide, mais également inégale de la consommation de SUP et de la participation à des JHA entre le début et le milieu ou la fin de l’adolescence. Un examen du chevauchement entre la consommation de SUP et la participation à des JHA sur plusieurs temps de mesure est donc préférable. Une seule étude, à notre connaissance, a examiné le degré de chevauchement entre les trajectoires de participation à des JHA et les trajectoires de consommation de SUP à l’adolescence : la moitié des jeunes qui cheminent sur une trajectoire élevée de consommation de SUP cheminent aussi sur une trajectoire élevée de JHA. En revanche, le tiers des jeunes qui cheminent sur une trajectoire élevée de JHA sont également des consommateurs réguliers (Wanner et al., 2006). Malheureusement, l’étude de Wanner et al. (2006), quoiqu’unique, souffre des mêmes limites que l’étude de Vitaro et al. (2004) puisqu’elle fait appel aux mêmes mesures et aux mêmes participants. Par conséquent, une nouvelle étude s’avère nécessaire afin de déterminer le degré de chevauchement des trajectoires de JHA et de SUP à l’adolescence.
Les facteurs de risque associés aux trajectoires de participation à des JHA et aux trajectoires de consommation de SUP
Un chevauchement élevé à l’adolescence entre les trajectoires de consommation de SUP et les trajectoires de participation à des JHA pourrait signifier une origine commune, du moins partielle. Cette origine pourrait être de nature génétique ou environnementale. Par conséquent, le second objectif de cette étude vise à établir les similitudes, mais aussi les différences entre l’architecture génétique et environnementale des trajectoires de consommation de SUP et de participation à des JHA. En guise de troisième et dernier objectif, nous visons à vérifier si certains endophénotypes hautement « héritables », tels les problèmes d’autorégulation, peuvent jouer un rôle dans le cas où la composante génétique s’avère importante. Il sera intéressant, en particulier, de vérifier si les mêmes endophénotypes sont associés aux trajectoires de participation à des JHA et aux trajectoires de consommation de SUP et s’ils caractérisent les adolescents qui cheminent à la fois sur une trajectoire élevée de JHA et une trajectoire élevée de SUP. En clarifiant ces objectifs, la présente étude permet de faire avancer les connaissances par rapport à l’étiologie de la participation à des JHA, l’étiologie de la consommation de SUP et l’étiologie de leur cooccurrence. Elle permet aussi de participer à la validation de la nouvelle classification proposée par l’American Psychiatric Association en regard des problèmes de jeu dans le DSM-V : une toxicomanie comportementale (sans substance) faisant partie de la même classification que les problèmes de toxicomanie avec substance. En effet, un chevauchement élevé et une étiologie commune pour les toxicomanies avec substance et les toxicomanies comportementales sont attendus en vertu de cette
nouvelle classification.
Origine génétique ou environnementale des trajectoires de consommation de SUP et de participation à des JHA
En comparant la similarité de jumeaux monozygotes qui partagent 100 % de leurs gènes et le même environnement à la similarité de jumeaux dizygotes de même sexe qui partagent également le même environnement, mais seulement 50 % de leurs gènes, il est possible de déterminer le rôle relatif des gènes, de l’environnement commun (qui rend les jumeaux similaires l’un à l’autre) ou de l’environnement unique (qui rend les jumeaux différents l’un de l’autre) par rapport à des phénotypes donnés, c.-à-d. la participation à des JHA et la consommation de SUP (Petrill, 2002).
Trois études avec des jumeaux adultes ayant été élevés au sein de la même famille ont démontré que 40 % à 60 % de la variance au chapitre des problèmes de jeu s’explique par des facteurs génétiques, le reste de la variance s’expliquant par des facteurs liés à l’environnement non partagé (c.-à-d., qui rend les jumeaux d’une même paire différents l’un de l’autre) (Eisen et al., 1998 ; Potenza, Xian, Shah, Scherrer, & Eisen, 2005 ; Slutske, Zhu, Meier, & Martin, 2010). Ces résultats semblent s’appliquer également aux hommes et aux femmes (Slutske et al., 2010), et ce, même si les taux de prévalence des problèmes de jeu sont plus élevés chez les hommes que chez les femmes (Desai, Maciejewski, Pantalon, & Potenza, 2005). Les études de jumeaux avec des adultes rapportent des résultats similaires par rapport à la consommation de psychotropes et aux problèmes liés à la consommation (Kendler, Jacobson, Prescott, & Neale, 2003 ; Tsuang et al., 1996).
Des résultats en partie différents ont été trouvés à l’adolescence en ce qui concerne la consommation de SUP. Dans ce cas, la composante liée à l’environnement partagé (c.-à-d., qui rend les jumeaux d’une même paire semblables l’un à l’autre) semble jouer un rôle significatif, en plus de la composante liée aux gènes (qui demeure la plus importante) et à la composante liée à l’environnement non partagé (Hopfer, Crowley, & Hewitt, 2003 ; Kendler, Schmitt, Aggen, & Prescott, 2008 ; Lynskey, Agrawal, & Heath, 2010 ; McGue, Elkins, & Iacono, 2000). Une étude récente avec des jeunes adultes a également trouvé une composante génétique importante concernant la participation aux JHA. En effet, 70 % de la variance par rapport aux problèmes de jeu était expliquée par des facteurs génétiques, alors que le reste était expliqué par des facteurs uniques à chaque jumeau (Beaver, Ratchford, & Ferguson, 2009). En somme, à l’adolescence comme à l’âge adulte, la participation à des JHA semble partiellement sous contrôle génétique. Cela semble également vrai pour la consommation de SUP, mais possiblement à un degré moindre en raison de la place occupée par les facteurs liés à l’environnement partagé. Aucune étude n’a toutefois comparé directement l’architecture génétique et environnementale des trajectoires de JHA et des trajectoires de SUP au début de l’adolescence.
Endophénotypes associés aux trajectoires de participation à des JHA et de consommation de SUP
La présence (probable) d’une composante génétique associée aux trajectoires de participation à des JHA et aux trajectoires de consommation de SUP commande l’examen d’endophénotypes possiblement communs aux deux types de trajectoires, eux-mêmes sous contrôle génétique. Ces endophénotypes peuvent faire référence à des problèmes d’autorégulation, tels que révélés par la présence de comportements impulsifs. En effet, le lien prédictif entre l’impulsivité et la participation à des JHA à l’adolescence est bien établi (Nower, Derevensky, & Gupta, 2004 ; Pagani, Derevensky, & Japel, 2009 ; Vitaro, Arseneault, & Tremblay, 1999). Ce lien prédictif impliquant l’impulsivité s’étend aussi à la consommation de SUP à l’adolescence (Dawe & Loxton, 2004 ; Verdejo-Garcia, Lawrence, & Clark, 2008). Il est, par conséquent, possible que les mêmes déficits d’autorégulation révélés par un niveau élevé d’impulsivité soient à l’origine des trajectoires de participation à des JHA et des trajectoires de consommation de SUP (Barnes, Welte, Hoffman, & Dintcheff, 2002 ; Leeman & Potenza, 2012 ; Vitaro et al., 2001). De plus, il est possible que les adolescents qui cheminent à la fois sur une trajectoire élevée de JHA et une trajectoire élevée de SUP se distinguent de leurs collègues qui cheminent sur une trajectoire élevée de JHA ou une trajectoire élevée de SUP par des déficits d’autorégulation plus importants. Dans leur modèle multidimensionnel, Whiteside et Lynam (2001) distinguent quatre volets particuliers liés aux déficits d’autorégulation : l’urgence, la préméditation, la persévérance et la recherche de sensation. Afin de bien cerner ces quatre volets, nous avons combiné des items d’hyperactivité (ex. : remue continuellement) et des items d’impulsivité (ex. : incapable d’attendre son tour, ne réfléchit pas avant d’agir). Deux autres raisons militent en faveur d’une telle fusion : les items d’impulsivité et d’hyperactivité sont hautement corrélés et ils ont été utilisés de manière combinée dans des études antérieures qui ont examiné la relation entre les déficits d’autorégulation à l’enfance avec l’émergence de la participation à des JHA au début de l’adolescence (Pagani et al., 2009 ; Vitaro & Wanner, 2011).
Le rôle des déficits d’autorégulation peut dépendre du sexe de l’enfant et du niveau socio-économique de la famille (Auger, Lo, Cantinotti, & O’Loughlin, 2010). Il peut aussi dépendre des pratiques parentales. Les interactions possibles entre des facteurs environnementaux (comme les pratiques parentales) et les dispositions personnelles à forte composante génétique (comme l’impulsivité) sont portées au compte de la composante génétique dans les analyses génétiquement informatives faisant appel à un devis de jumeaux, comme dans le cas présent. Pourtant, de telles interactions reflètent des effets de l’environnement et non des effets purement des gènes. Ces effets sont importants, particulièrement à la lumière des résultats des rares études génétiquement informatives qui semblent accorder peu de place aux facteurs de l’environnement au niveau de l’architecture de la consommation de SUP et de la participation à des JHA à l’adolescence.
Pratiques parentales. Trois dimensions des pratiques parentales peuvent jouer un rôle modérateur eu égard au lien entre les déficits d’autorégulation et les trajectoires simples ou mixtes de JHA et de SUP : la coercition-punition, la communication-affection et le contrôle-discipline. Ces dimensions ont été retenues en raison de leur pertinence théorique et empirique par rapport aux domaines de la consommation de SUP, de la participation à des JHA et d’autres comportements déviants (Hawkins, Catalano, & Miller, 1992 ; Vachon, Vitaro, Wanner, & Tremblay, 2004 ; Vitaro, Brendgen, & Tremblay, 2001). Afin de disposer de mesures proximales, mais préalables aux trajectoires de SUP et de JHA, nous avons recueilli les informations sur les pratiques parentales à la préadolescence. Cette stratégie permet de mieux refléter les pratiques parentales contemporaines aux JHA et aux SUP, sans que celles-ci puissent être affectée par les trajectoires de JHA et de SUP.
Pourquoi le début de l’adolescence ?
En examinant les trajectoires de participation à des JHA et de consommation de SUP ainsi que leur architecture étiologique au début de l’adolescence, nous réduisons les risques d’influences réciproques entre les deux types de comportements. En effet, des effets réciproques entre la participation à des JHA et la consommation de SUP sont possibles, de sorte que la consommation de SUP peut augmenter à la suite d’une participation à des JHA ou, à l’inverse, les activités de JHA peuvent augmenter à la suite d’une consommation de SUP (Vanyukov et al., 2012). Un accroissement de leur chevauchement par de telles influences réciproques viendrait obscurcir l’examen de leur étiologie initiale. Il est peu probable que de tels effets réciproques existent au début de l’adolescence alors que les jeunes s’initient à la consommation de SUP et à la participation à des JHA. Pour cette raison, nous mettons l’accent sur cette période développementale, d’autant plus que, comme mentionné plus haut, une consommation précoce de SUP ou une participation précoce à des JHA augmente le risque de développer des problèmes à moyen ou à long terme (Vitaro, Wanner, Carbonneau, & Tremblay, 2007).
Méthodologie
Participants
Les jumeaux qui ont participé à cette étude font partie de l’Étude des jumeaux nouveau-nés du Québec (ÉJNQ) (Boivin et al., 2013). Ils ont été recrutés à partir des registres de naissance entre 1996 et 1998. Un total de 650 paires de jumeaux composaient l’échantillon initial de l’ÉJNQ, soit 113 paires de jumeaux monozygotes (MZ), 110 paires de jumeaux dizygotes (DZ) de sexe masculin, 115 paires de jumeaux DZ de sexe féminin et 205 paires de jumeaux DZ mixtes. La zygotie a été établie à l’âge de 18 mois sur la base de critères d’apparence physique à l’aide du questionnaire de zygotie pour jeunes jumeaux (Goldsmith, 1991). Pour 123 paires au hasard, nous avons analysé 10 marqueurs géniques. La zygotie établie avec l’aide du questionnaire correspondait à celle établie à l’aide des analyses de l’ADN dans 94 % des cas, ce qui correspond aux résultats habituels avec des échantillons de jumeaux (Forget-Dubois et al., 2003).
Quatre-vingt-quatre pour cent des familles (n = 546) étaient de descendance européenne, 3 % (n = 19) de descendance africaine, 2 % (n = 13) de descendance asiatique, 2 % (n = 13) de descendance des Premières Nations, et 9 % (n = 59) de descendance inconnue. À l’âge de 5 mois, les caractéristiques des familles des jumeaux étaient très semblables aux caractéristiques des familles d’un échantillon de singletons représentatifs des enfants du Québec (Santé Québec, Jetté, Desrosiers, & Tremblay, 1998). Au point de départ, 95 % des parents vivaient ensemble ; 44 % des jumeaux étaient les aînés ; 66 % des mères et 60 % des pères étaient âgés entre 25 et 34 ans ; 17 % des mères et 14 % des pères n’avaient pas terminé le secondaire ; 28 % des mères 27 % des pères avaient un diplôme universitaire ; 83 % des parents occupaient un emploi ; et 10 % des familles recevaient des prestations d’assurance-emploi ou d’assurance sociale.
Les cueillettes de données se sont déroulées sur une base quasi annuelle depuis la naissance. Aux fins de cet article, quatre temps de mesure sont utilisés : 13, 14 et 15 ans pour les mesures de participation à des JHA et de consommation de SUP et 12 ans pour la mesure d’impulsivité ainsi que les variables de contrôle. Chaque vague de données a été autorisée par le comité éthique de l’Hôpital Sainte-Justine. Des 650 paires initiales, 426 ont participé à la cueillette à 12 ans, 410 paires à 13 ans, 406 à 14 ans et 403 à 15 ans. Il est à noter que les paires de jumeaux perdues en raison de l’attrition ne se distinguent pas de celles qui sont restées actives au chapitre de la zygotie, des mesures de tempérament recueillies à 5 mois et de plusieurs variables sociodémographiques, à l’exception du niveau d’éducation des pères qui tend à être supérieur chez les participants actifs.
Instruments de mesure
Participation à des JHA. La fréquence de participation à des JHA à 13, 14 et 15 ans a été évaluée à l’aide d’un questionnaire rempli par chaque jumeau, le South Oaks Gambling Screen, version adolescente (SOGS-RA ; Winters, Stinchfield, & Fulkerson, 1993). Une fréquence totale de participation à chaque année était obtenue en additionnant les réponses de chaque jumeau à une série de 12 activités de JHA auxquelles il aurait pu prendre part au cours des 12 derniers mois (ex. : jouer aux cartes pour de l’argent). Pour chaque activité, l’échelle de réponse pouvait varier entre 0 (jamais) et 6 (quotidiennement) (alpha de Cronbach de 0.66 à 13 ans, 0.72 à 14 ans et 0.66 à 15 ans), avec une possibilité d’un score maximal de 72. Un nombre important de participants n’avaient pris part à aucune activité associée aux jeux de hasard au cours de la dernière année (c.-à-d., en moyenne 84.2 % pour les trois temps de mesure). Toutefois, les autres participants avaient pris part à au moins une activité associée aux jeux de hasard, jusqu’à concurrence d’un score de 21 (à 13 ans), 15 (à 14 ans) et 18 (à 15 ans). À 13, 14 et 15 ans, la moyenne de participation à des JHA était semblable chez les paires MZ et chez les paires DZ (13 ans : MZ M = 0.40, ÉT = 1.17 ; DZ M = 0.50, ÉT = 1.62 ;14 ans : MZ M = 0.32, ÉT = 0.95 ; DZ M = 0.37, ÉT = 1.43 ; 15 ans : MZ M = 0.40, ÉT = 1.53 ; DZ M = 0.33, ÉT = 1.44).
Consommation de SUP. La fréquence de consommation de SUP à 13, 14 et 15 ans a été mesurée à l’aide d’un questionnaire rempli par chaque jumeau, le Personal Experience Screening Questionnaire (PESQ ; Henly & Winters, 1989 ; Winters, Stinchfield, Henly, & Schwartz, 1990-91). Une fréquence totale de consommation a été établie en additionnant les réponses de chaque jumeau par rapport à leur consommation possible de trois items au cours des 12 derniers mois : alcool (consommation simple), alcool (5 consommations ou plus à une même occasion) et marijuana. La réponse à chaque item pouvait varier entre 0 (jamais) à 4 (quotidiennement). Comme dans le cas des jeux de hasard et d’argent, un nombre important de participants n’avait rien consommé au cours de la dernière année (moyenne de 60.9 % pour les trois temps de mesure). Les alphas de Cronbach variaient entre 0.72 à 13 ans, 0.70 à 14 ans et 0.75 à 15 ans. À nouveau, les paires MZ et les paires DZ avaient des cotes moyennes semblables sur cette variable à 13, 14 et 15 ans (13 ans : MZ M = 0.13, ÉT = 0.31 ; DZ M = 0.15, ÉT = 0.41 ; 14 ans : MZ M = 0.31, ÉT = 0.61 ; DZ M = 0.33, ÉT = 0.58 ; 15 ans : MZ M = 0.71, ÉT = 0.91 ; DZ M = 0.76, ÉT = 0.94)
Mesure d’impulsivité. Pour la mesure d’impulsivité, nous avons fait appel à l’enseignante de sixième année (60 % des jumeaux n’étaient pas dans la même classe en sixième année). L’impulsivité a été cotée à l’aide de 5 items (ex. : « a remué sans cesse », « a été impulsif, a agi sans réfléchir », etc.). Pour chaque item, l’enseignante cotait 0, 1 ou 2, selon que le descripteur comportemental n’était pas du tout, un peu ou très typique du jumeau évalué (Alpha de Cronbach : 0.88, M = 1.66, ÉT = 2.36). Ces items faisaient partie d’un questionnaire plus vaste sur le comportement de chaque jumeau, le Questionnaire sur le développement social des enfants (Tremblay, Vitaro, Gagnon, Piché, & Royer, 1992).
Pratiques parentales. Trois dimensions des pratiques parentales telles que perçues par les mères des jumeaux ont été recueillies à l’âge de 12 ans à l’aide de la version française ou anglaise, selon la langue parlée par les parents, du Parent’s Cognition and Conduct Towards the Infant Scale (PACOTIS ; Boivin, Pérusse, Dionne, Saysset, Zoccolillo, Tarabulsy et al., 2005). Ces trois dimensions sont la coercition-punition, la communication-affection et le contrôle-discipline. La coercition-punition a été cotée à l’aide de 4 items (ex. : « Est-ce qu’il vous arrive d’empoigner fermement/secouer cet enfant, lorsque difficile ? », etc.), la communication-affection à l’aide de 6 items (ex. : « Est-ce qu’il vous arrive de parler/jouer avec cet enfant ? ») et le contrôle-discipline à l’aide de 4 items (ex. : « Est-ce qu’il vous arrive de lui dire exactement quoi faire dans une situation nouvelle ? »). Pour chaque item, la mère cotait 1, 2, 3 ou 4, selon que le descripteur comportemental n’était jamais, rarement, parfois ou souvent typique de la pratique parentale évaluée [Alpha de Cronbach : 0.70 pour coercition-punition (M = 5.12, ÉT = 2.30), 0.73 pour communication-affection (M = 16.22. ÉT = 4.38) et 0.71 pour contrôle-discipline (M = 6.12, ÉT = 3.35).
Variables de contrôle susceptibles de jouer un rôle modérateur. Le risque socio-familial est un facteur de risque distal composé d’une accumulation de désavantages socioéconomiques et démographiques présents à long terme et qui entravent la stabilité de la vie familiale des individus (Bakker, Ormel, Verhulst, & Oldehinkel, 2011 ; Moore, Vandivere, & Redd, 2006). Ces désavantages réfèrent à des situations comme la pauvreté, la séparation/le divorce et un faible niveau d’éducation des parents dont on sait qu’ils sont des facteurs de risque dans le développement de problèmes extériorisés (Dodge, Greenberg, & Malone, 2008 ; Hoeve et al., 2007 ; Lengua, Bush, Long, Kovacs, & Trancik, 2008 ; Mack, Leiber, Featherstone, & Monserud, 2007 ; Neumann, Barker, Koot, & Maughan, 2010). Cette variable a été évaluée par les mères des participants à la naissance de ces derniers, à partir des indicateurs suivants : (a) la structure familiale (monoparentale ou biparentale), (b) le niveau d’éducation des parents (ou de la mère si le participant grandissait dans une famille monoparentale) et (c) le revenu des parents (ou de la mère si le participant grandissait dans une famille monoparentale). Un score de 0 a été attribué à la structure familiale si le participant vivait avec ses deux parents naturels et un score de 1 a été attribué pour tous les autres cas. En ce qui a trait au niveau d’éducation des parents et leur revenu, on leur a attribué un score de 1 si les scores individuels se situaient dans le quartile le plus bas de la distribution respective des variables. Un score de 0 a été attribué aux scores se situant au-dessus du premier quartile des distributions. Une variable de risque socio-familial a été ensuite créée, avec une possibilité d’un score entre 0 et 3. Un score élevé indique une cooccurrence élevée entre les facteurs et, en conséquence, une exposition plus élevée à des situations de risque socio-familial.
Les recherches antérieures ont aussi démontré que le sexe influence la fréquence de participation à des jeux de hasard. Plus précisément, les garçons tendent à jouer plus souvent et expérimentent un plus grand nombre de problèmes de jeu que les filles (Gupta & Derevensky, 1998), les différences de ratios entre les garçons et les filles se situant entre 3 :1 et 5 :1, selon les recherches. En conséquence, le risque socio-familial et le sexe des jumeaux servent de variables de contrôle. Elles servent aussi de variables potentiellement modératrices.
Résultats
Avant d’aborder les résultats en lien avec chaque objectif, trois mises au point sont nécessaires : 1- pour les analyses de trajectoires, les résultats ont été établis avec l’ensemble des jumeaux disponibles. Toutefois, de façon à assurer une certaine représentativité des données et à minimiser les problèmes associés aux valeurs manquantes, chacun des jumeaux devait avoir complété les mesures relatives à la participation aux JHA et à la consommation de SUP à au moins deux temps de mesure sur trois (c.-à-d., 13, 14 et 15 ans). Pour ces analyses, le pourcentage de données manquantes se situe à 8.5 % ; 2- pour les analyses génétiquement informatives, seules les paires de jumeaux de même sexe ont été retenues pour des raisons décrites plus loin ; 3- pour les analyses de régression, nous avons utilisé le même échantillon que pour les trajectoires ; dans ce cas, la non-indépendance des données est prise en compte. Pour les analyses génétiquement informatives et les analyses de régression, le pourcentage de données manquantes se situe à 19.44 %. En lien avec les techniques modernes d’estimation de données manquantes visant à réduire le biais d’estimation, celles-ci ont été imputées à l’aide de la méthode EM (Estimation maximisation) de SPSS. Comparativement aux analyses de trajectoires, ce pourcentage plus important de données manquantes s’explique par le fait que les mesures se rapportant aux variables de prédiction concernaient les parents ou les enseignants dont la participation n’était pas toujours assurée.
Trajectoires de consommation de SUP et de participation à des JHA de 13 à 15 ans (objectif 1)
Dans le but de vérifier les trajectoires simples et jointes de participation à des JHA et de consommation de SUP, une méthode semi-paramétrique élaborée par Nagin (1999) a été employée à l’aide du logiciel SAS. Cette méthode permet d’identifier des groupes de participants qui se distinguent au niveau de leur profil de participation à des JHA et de leur profil de consommation de SUP sur plusieurs temps de mesure (c.-à-d., 13, 14 et 15 ans, dans le cas présent). En plus de permettre le repérage de groupes avec des trajectoires distinctes, cette technique permet de déterminer la forme (linéaire ou curvilinéaire) des trajectoires types. Cette méthode est basée sur le degré de variation du critère d’information bayésien (BIC) qui permet de sélectionner le meilleur des modèles à partir d’un ensemble de modèles plausibles. Un modèle est meilleur qu’un autre s’il se rapproche de 0.
En se basant sur le contexte théorique présenté plus haut, deux ou trois groupes avec des trajectoires distinctes étaient attendus pour la participation aux JHA et le même nombre pour la consommation de SUP. Étant donné le nombre important de participants avec un faible niveau de consommation de SUP et une faible participation à des JHA (c.-à-d., avec des cotes de 0), il a été convenu d’identifier les trajectoires en utilisant une distribution de Poisson (c.-à-d., Zero Inflated Poisson ; ZIP). De plus, étant donné le nombre de temps de mesures (c.-à-d., trois) la modélisation des trajectoires a été effectuée à l’aide de paramètres quadratique (c.-à-d., curvilinéaire) et linéaire, ainsi qu’avec l’ordonnée à l’origine.
Pour la fréquence de participation aux JHA, les résultats de l’analyse TRAJ révèlent que la solution à deux groupes est plus parcimonieuse (BIC = -1252.78) que la solution à un groupe (BIC = -1795.16). À leur tour, les solutions à trois groupes, quatre et cinq groupes se révèlent successivement plus parcimonieuses que la solution à deux groupes (3 groupes = -1174.39 ; 4 groupes = -1171.80 ; 5 groupes = -1171.31 ; 6 groupes = -1177.77). Toutefois, pour les solutions à trois, quatre et cinq groupes un ou plusieurs des paramètres se révélaient non significatifs. En conséquence, la solution à deux groupes fut retenue pour la participation aux JHA entre 13 et 15 ans. Comme illustrées à la figure 1, les deux trajectoires de fréquence de participation à des JHA montrent des profils longitudinaux très distincts. Un premier groupe (n = 557, 86.9 %) affiche une probabilité constante de fréquence de participation faible entre 13 et 15 ans (ordonnée à l’origine = -2.34, SE = 0.12, p < .001). Au contraire, un deuxième groupe (n = 84, 13.1 %) montre une probabilité de participation constamment plus élevée entre 13 et 15 ans (ordonnée à l’origine = 0.92, SE = 0.06, p < .001). La fréquence moyenne des participants cheminant sur la trajectoire basse est : .13 (ÉT = 0.40) à 13 ans, .07 (ÉT = 0.29) à 14 ans et .05 (ÉT = 0.23) à 15 ans. Aux fins de comparaison, la fréquence moyenne des participants cheminant sur la trajectoire élevée est : 2.65 (ÉT = 3.09) à 13 ans, 2.20 (ÉT = 2.76) à 14 ans et 2.60 (ÉT = 3.52) à 15 ans.
Pour la consommation de SUP, les résultats de l’analyse TRAJ révèlent que la solution à deux groupes se révèle également plus parcimonieuse (BIC = -1314.91) que les solutions à un groupe (BIC = -1383.33) et à trois groupes (BIC = -1324.61). La figure 1 montre un premier groupe (n = 542, 84.6 %) avec une probabilité constante de faible consommation entre 13 et 15 ans (pente = 10.08, SE = 0.99, p < .001 ; ordonnée à l’origine = -13.94, SE = 1.25, p < .001). Elle montre aussi un second groupe de consommateurs de SUP (n = 99, 15.4 %) dont la trajectoire de SUP est en progression constante entre 13 et 15 ans (pente = 7.13, SE = 0.76, p < .001 ; ordonnée à l’origine = -8.61, SE = 0.97, p < .001). La consommation moyenne des participants cheminant sur la trajectoire basse est de .07 (ÉT = 0.18) à 13 ans, de .14 (ÉT = 0.27) à 14 ans et de .45 (ÉT = 0.57) à 15 ans, alors que la consommation moyenne des participants cheminant sur la trajectoire en progression est de .55 (ÉT = 0.72) à 13 ans, de 1.31 (ÉT = 0.87) à 14 ans et de 2.26 (ÉT = 0.96) à 15 ans.
En somme, le nombre de trajectoires de participation à des JHA et de consommation de SUP est le même entre 13 et 15 ans, mais la trajectoire élevée de participation à des JHA est déjà élevée à 13 ans alors que celle de consommation de psychotropes croît régulièrement entre 13 et 15 ans. Le pourcentage de jeunes qui cheminent sur l’une ou l’autre des trajectoires élevées semble également correspondre, mais s’agit-il des mêmes jeunes ? Afin de répondre à cette question, nous avons examiné le degré de chevauchement entre les trajectoires de participation à des JHA et les trajectoires de consommation de SUP à l’aide du chi-carré. Les résultats du croisement entre les trajectoires de SUP et les trajectoires de JHA révèlent que le degré de chevauchement entre les deux séries de trajectoires est significatif (χ2 (1) = 55.63, p < .001) et qu’elles sont significativement corrélées (rho de Spearman = 0.30, p < .001). Le croisement des trajectoires de SUP et de JHA a, par ailleurs, généré quatre groupes : le groupe « JHA faible/SUP faible » (n = 496, 77.4 %), le groupe « JHA faible/SUP haut » (n = 63, 9.8 %), le groupe « JHA haut/SUP faible » (n = 46, 7.2 %) et le groupe « JHA haut/SUP haut » (n = 36, 5.6 %). Ces groupes seront utilisés plus tard en lien avec l’objectif 3.
Analyses ACE univariées des trajectoires de SUP et de JHA (objectif 2)
Mplus v7.0 (Muthén & Muthén, 1998-2012) a été utilisé pour vérifier deux modèles ACE univariés de façon à estimer la contribution relative des facteurs génétiques et environnementaux en regard des trajectoires de participation à des JHA et de consommation de SUP. En comparant les corrélations intrapaires des jumeaux MZ (qui partagent 100 % de leurs gènes) et DZ du même sexe (qui partagent en moyenne 50 % de leurs gènes), les sources de variabilité sur les trajectoires peuvent être estimées sur le plan de facteurs génétiques additifs latents (A), de facteurs latents à dominance génétique (D), de facteurs de l’environnement partagé latent (C) et de facteurs de l’environnement non-partagé latent (E) (Neale & Cardon, 1992). Pour des raisons techniques, les analyses génétiques reposent sur une comparaison des paires MZ (qui sont toujours du même sexe) et des paires DZ du même sexe. Par conséquent, nous avons laissé de côté les paires de DZ de sexe opposé pour ces analyses.
Les corrélations intrapaires pour les facteurs génétiques additifs latents (A) sont fixées à 1.0 pour les jumeaux MZ et à 0.5 pour les jumeaux DZ. Les corrélations intrapaires pour les facteurs latents à dominance génétique (D) sont fixées à 1.0 pour les jumeaux MZ et à 0.25 pour les jumeaux DZ. Les corrélations intrapaires des facteurs environnementaux partagés (C) sont fixées à 1.0 à la fois pour les jumeaux MZ et DZ, et les corrélations intrapaires des facteurs environnementaux non partagés sont fixés à 0.0 à la fois pour les jumeaux MZ et DZ. L’estimation des paramètres a, d, c et e, qui sont fixés pour être égaux pour chaque membre d’une paire de jumeaux, représentent les coefficients de saturation fournissant l’information quant à la contribution relative des facteurs latents A, D, C et E sur la variance totale de chacun des phénotypes, l’erreur de mesure étant incluse dans le paramètre E. Toutefois, il n’est pas possible d’estimer C et D dans le même modèle avec des jumeaux élevés ensemble puisque l’estimation de ces paramètres est basée sur la même information (c.-à-d., différence de corrélation entre MZ et DZ). La parcimonie du modèle est basée sur le RMSEA et sur le chi-deux. Des valeurs basses et non significatives du RMSEA et du chi-deux, sous .08, indiquent que le modèle est parcimonieux.
Les résultats du modèle ACE univarié pour la consommation de SUP et la fréquence de participation à des JHA sont illustrés au tableau 1. Pour la fréquence de participation à des JHA, une observation des différences de corrélation entre les jumeaux MZ et DZ suggère un modèle à dominance génétique (c.-à-d., ADE). En effet, la corrélation intrapaire de Spearman s’avère plus de deux fois supérieure chez les jumeaux MZ (r = .62) que chez les jumeaux DZ (r = -.03). Toutefois, les paramètres du modèle ADE se révèlent non significatifs. Par ailleurs, une comparaison de la parcimonie entre les modèles ACE et AE montre une différence entre les deux (ACE : χ2 (1) = 2.53, p = .11 ; AE : χ2 (2) = 2.21, p = .33), le modèle AE se révélant plus parcimonieux. De plus, le paramètre C du modèle ACE explique 0 % de la variance et n’est pas significatif (p = 1.0). Conséquemment, le modèle AE est retenu comme le plus parcimonieux, les facteurs génétiques (A) expliquant 58.37 % de la variance (p < .001) et l’environnement non partagé (E) expliquant 41.63 % de la variance. À l’instar des trajectoires de JHA, la différence de corrélations entre les jumeaux MZ (r = .68) et les jumeaux DZ (r = .17) au chapitre des trajectoires de consommation de SUP suggère un modèle à dominance génétique. Toutefois, les paramètres du modèle ADE se révèlent à nouveau non significatifs. Par ailleurs, une comparaison de la parcimonie entre les modèles ACE et AE montre une différence entre les deux (ACE : χ2 (1) = 2.41, p = .12 ; AE : χ2 (2) = 2.12, p = .35), le modèle AE se révélant plus parcimonieux. De plus, le paramètre C du modèle ACE explique 0 % de la variance et n’est pas significatif (p = 1.0). Conséquemment, le modèle AE est retenu comme le plus parcimonieux, les facteurs génétiques (A) expliquant 65.93 % de la variance (p < .001) et l’environnement non partagé (E) expliquant 34.07 % de la variance par rapport aux trajectoires de SUP.
Régressions logistiques et facteurs de prédiction (objectif 3)
Des régressions logistiques ont été effectuées avec SPSS 20 pour vérifier les liens prédictifs entre l’impulsivité et l’appartenance aux quatre groupes générés par le croisement des trajectoires de participation à des JHA et de consommation de SUP (c.-à-d., le groupe « JHA faible/SUP faible », le groupe « JHA faible/SUP haut », le groupe « JHA haut/SUP faible » et le groupe « JHA haut/SUP haut »). Le sexe des jumeaux, leur risque socio-familial, ainsi que les trois dimensions des pratiques parentales sont également incluses dans ces analyses comme variables de contrôle et variables potentiellement modératrices. Pour toutes les analyses, chaque groupe est contrasté au groupe « Jeu faible/Consommation de substances faible » qui joue le rôle de groupe de référence. L’interdépendance des données due à la nature gémellaire est contrôlée en utilisant une erreur standard corrigée à l’aide de la méthode Hubert-Sandwich-White. Les variables indépendantes suivantes ont été entrées dans le bloc 1 : sexe, risque socio-familial, impulsivité, coercition-punition, communication-affection et contrôle-discipline. Dans le bloc 2, plusieurs interactions doubles (« impulsivité x sexe », « impulsivité x coercition-punition », etc.) ont été ajoutées au modèle. Pour éviter les problèmes de multicolinéarité, toutes les variables continues ont été standardisées avant de créer les termes d’interaction. Ces variables standardisées ont été utilisées pour les analyses (Jaccard, Turrisi, & Wan, 1990). Afin de décomposer les interactions significatives (voir plus loin), la procédure décrite par Holmbeck (2002) fut utilisée. Le coefficient standardisé de régression (β) et l’erreur standard sont présentés au Tableau 2.
Par rapport au groupe « JHA faible/SUP faible », les résultats indiquent que l’impulsivité (β = .35, p = .002), ainsi que le contrôle-discipline (β = .26, p = .04) prédisent de manière unique et indépendante l’appartenance au groupe « JHA faible/SUP haut ». De plus, les résultats révèlent un lien marginalement significatif entre le risque socio-familial et l’appartenance au groupe « JHA faible/SUP haut » (β = -.32, p = .07).
Par rapport au groupe « JHA faible/SUP faible », les résultats indiquent que le sexe (β = -1.19, p = .002) ainsi que le contrôle-discipline (β = .36, p = .003) sont significativement associés à l’appartenance au groupe « JHA haut/SUP faible ». Les résultats révèlent aussi un lien marginalement significatif entre l’impulsivité et l’appartenance au groupe « JHA haut/SUP faible » (β = .24, p = .06). Finalement, les résultats révèlent un effet d’interaction significatif entre l’impulsivité et la communication-affection (β = .25, p = .02). Les résultats de la décomposition de cette interaction révèlent que lorsque la communication-affection est élevée (c.-à-d., à un écart-type au-dessus de la moyenne) le lien entre l’impulsivité et l’appartenance au groupe « JHA haut/SUP faible » est significatif (β = .49, p = .01). Toutefois, lorsque la communication-affection est faible (c.-à-d., à un écart-type sous la moyenne) le lien entre l’impulsivité et l’appartenance au groupe « JHA haut/SUP faible » n’est plus significatif (β = -.01, p = .95).
Finalement, et toujours par rapport au groupe « JHA faible/SUP faible », les résultats révèlent que le contrôle-discipline est significativement associé à l’appartenance au groupe ‘JHA haut/SUP haut’ (β = .44, p = .001).
Discussion
Les résultats de la présente étude se résument ainsi : 1- entre 13 et 15 ans, il existe dans cet échantillon de jumeaux deux catégories de joueurs et deux catégories de consommateurs de psychotropes : les actifs (entre 13 % et 15 %) et les inactifs/ou peu actifs ; 2- les trajectoires de consommation de SUP et les trajectoires de participation à des JHA sont en grande partie sous contrôle génétique ; 3- les variables d’ordre personnel et socio-familial qui contribuent à prédire les trajectoires simples ou la trajectoire mixte de JHA et de SUP sont différentes même si elles sont interreliées. Chacun de ces trois résultats est discuté tour à tour.
Les trajectoires de JHA et de SUP (objectif 1)
La plupart des études qui ont établi des trajectoires types de consommation de SUP et de participation à des JHA à l’adolescence trouvent plus de deux trajectoires. Par exemple, Wanner et al. (2006) ont trouvé trois trajectoires de SUP et trois trajectoires de JHA du début à la fin de l’adolescence : une trajectoire basse, une trajectoire précoce-élevée et une trajectoire progressive et tardive. Pourquoi alors trouvons-nous seulement deux trajectoires de SUP et deux trajectoires de JHA dans la présente étude ? La réponse à cette question tient probablement au fait que les jeunes qui adoptent une trajectoire tardive par rapport à la consommation de SUP ou à la participation à des JHA n’ont pas encore eu l’occasion de se manifester, le dernier temps de mesure dans la présente étude étant limité à 15 ans. Ainsi, il est possible, voire probable, que d’autres trajectoires actives de SUP ou de JHA apparaîtront à partir de 15 ans, amenant le total des trajectoires à 3 et plus lorsque la fin de l’adolescence sera atteinte. D’autres raisons peuvent aussi contribuer à expliquer ces divergences : une opérationnalisation différente de la participation aux JHA et de la consommation de SUP, mais aussi des distinctions importantes quant aux caractéristiques des participants. Par exemple, l’échantillon dans la recherche de Wanner et al. (2006) était composé de participants de sexe masculin seulement et de milieu défavorisé. En dépit de ces différences, le nombre de trajectoires de SUP et le nombre de trajectoires de JHA demeure constant d’une étude à l’autre : trois dans l’étude de Wanner et al. (2006) et deux dans le cas présent. Mais, est-ce les mêmes jeunes qui cheminent sur les deux trajectoires élevées de SUP et de JHA ?
Dans le présent échantillon, un nombre non négligeable de participants (5.6 %) évolue à la fois sur une trajectoire élevée de SUP et de JHA. Cette cooccurrence entre les deux types de comportement corrobore celle notée par d’autres chercheurs (Barnes et al., 2009 ; Vitaro, Brendgen, Ladouceur, et al., 2001 ; Winters & Anderson, 2000). Cette cooccurrence n’est toutefois pas en équilibre puisque 7.2 % des jeunes âgés de 13 à 15 ans qui cheminent sur une trajectoire élevée de JHA ne cheminent pas sur une trajectoire élevée de SUP, alors qu’environ 9.8 % des jeunes qui cheminent sur une trajectoire élevée de SUP ne cheminent pas sur une trajectoire élevée de JHA. Nous formulons l’hypothèse que ce déséquilibre tendra à s’amenuiser en deuxième partie de l’adolescence en raison, entre autres choses, de possibles influences réciproques entre la consommation de SUP et la participation à des JHA (Vitaro et al., 2001).
Chevauchement au niveau de la composante génétique (objectif 2)
Est-ce que le chevauchement entre les trajectoires de SUP et les trajectoires de JHA peut s’expliquer par la présence de facteurs génétiques et environnementaux communs ? Sur la base des résultats découlant des analyses de génétique quantitative, la réponse à cette question pourrait être positive. En effet, à l’instar des études précédentes menées auprès d’adolescents (Beaver et al., 2010 ; Lynskey et al., 2010), la composante génétique (c.-à-d., la composante A) explique la majorité de la variance dans le cas des trajectoires de SUP et dans le cas des trajectoires de JHA. Il est à noter que la composante génétique est aussi importante ici en regard des trajectoires précoces de JHA et de SUP qu’elle l’est en regard des problèmes de toxicomanie ou de jeu pathologique chez les adultes (Eisen et al., 1998 ; Potenza, Xian, Shah, Scherrer, & Eisen, 2005 ; Slutske, Zhu, Meier, & Martin, 2010). En plus de la composante génétique, les facteurs de l’environnement non partagé (représentés par la composante E) semblent jouer un rôle d’égale importance, quoique plus modeste que celui des gènes, vis-à-vis les trajectoires de SUP et les trajectoires de JHA. Ces facteurs peuvent inclure, par exemple, des expériences sociales avec les pairs ou l’exposition à des publicités entourant les JHA et les SUP ainsi que l’erreur de mesure.
Contrairement aux attentes, l’environnement partagé (c.-à-d., la composante C) ne semble jouer aucun rôle quant à la participation aux JHA ou la consommation de SUP. Pourtant, dans les études qui utilisent un seul enfant par famille, les facteurs de l’environnement partagé comme les problèmes de jeu ou la toxicomanie des parents semblent jouer un rôle important (Poelen, Scholte, Willemsen, Boomsma, & Engels, 2007 ; Vachon et al., 2004). Cette discordance au niveau du rôle des variables de l’environnement partagé entre les études de jumeaux et les études de singletons peut s’expliquer par le fait que les études de singletons ne contrôlent pas la présence possible, voire probable, de corrélations entre les gènes et l’environnement. Selon ce scénario, des parents toxicomanes ou aux prises avec un problème de jeu transmettraient leur vulnérabilité aux SUP ou aux JHA à leur progéniture par voie génétique plutôt que par voie culturelle. Ces deux voies sont confondues dans les études avec un seul enfant par famille, entraînant une surestimation des effets environnementaux, alors qu’elles peuvent être départagées dans les études de jumeaux. Ceci ne signifie pas que les facteurs liés à l’environnement, partagé ou unique, ne jouent qu’un rôle mineur ; ils peuvent interagir avec les facteurs génétiques et ces termes d’interaction, dont la présence a été confirmée dans de nombreuses études, sont portés au compte de la composante A dans les analyses de génétique quantitative.
Variables associées de façon prédictive aux trajectoires simples ou mixtes de JHA (objectif 3).
Le chevauchement élevé entre les trajectoires de SUP et de JHA ainsi que leurs bases génétiques importantes laissent croire qu’elles peuvent partager des endophénotypes communs, eux-mêmes sous contrôle génétique (Leeman et Potenza, 2012). Ces endophénotypes, qui servent de médiateurs entre les gènes et les trajectoires de SUP ou de JHA, peuvent prendre la forme de comportements impulsifs. Ces comportements sont effectivement des prédicteurs établis de consommation de SUP et de participation à des JHA et ils comportent une composante génétique importante (Bezdjian et al., 2011). Le troisième objectif visait précisément à regarder si les endophénotypes associés aux différentes trajectoires sont les mêmes et s’ils sont modérés de la même manière par les facteurs de l’environnement. Les résultats, à cet effet, sont à la fois probants et intrigants. En effet, l’impulsivité est associée à la fois aux trajectoires simples de JHA et de SUP, mais n’a aucune valeur prédictive eu égard à la trajectoire mixte. Ces résultats sont surprenants dans la mesure où, intuitivement, l’impulsivité devrait être un facteur de risque encore plus important par rapport à l’évolution de la trajectoire mixte. Toutefois, comme mentionné plus haut, on peut s’attendre à ce que le déséquilibre entre les trajectoires s’amenuise durant la deuxième partie de l’adolescence, ce qui devrait se traduire par une augmentation du nombre de participants cheminant sur la trajectoire mixte et, par conséquent, une puissance statistique accrue pour déceler les éléments, incluant l’impulsivité, sur lesquels cette trajectoire pourrait se distinguer des autres. Il est également possible que des variables autres que l’impulsivité puisse expliquer le passage ou l’appartenance vers la trajectoire mixte. Par exemple, certains auteurs ont montré que les prédicteurs de l’appartenance à une trajectoire de consommation « élevée/élevée » d’alcool et de tabac pouvaient être différents de ceux expliquant l’appartenance à une trajectoire de consommation simple (Jackson, Sher, & Schulenberg, 2005). Ces résultats suggèrent que la cooccurrence entre deux phénomènes à priori interreliés pourrait s’expliquer par des prédicteurs différents.
Par ailleurs, pour les enfants bénéficiant d’une communication-affection élevée, l’impulsivité prédit une appartenance au groupe « JHA haut/SUP faible ». Ce résultat est aussi étonnant dans la mesure où il est généralement reconnu qu’un faible soutien parental est un facteur de risque dans le développement de problèmes extériorisés comme la consommation de SUP (Wills et Yaeger, 2003). Toutefois, il est important de noter ici qu’on ne retrouve pas cet effet d’interaction par rapport au groupe « JHA faible/SUP haut », ce qui suggère des mécanismes différents pour la participation à des JHA et la consommation de SUP. À cet égard, il est possible que des niveaux élevés d’affection de la part des parents soient interprétés par les enfants impulsifs comme de la permissivité (Barratt & Patton, 1983 ; Patton, Stanford, & Barratt, 1995), ce qui pourrait s’avérer particulièrement pertinent par rapport à la problématique des JHA vis-à-vis de laquelle les parents ont tendance à faire preuve de laxisme (Campbell, Derevensky, Meerkamper, & Cutajar, 2011).
Le résultat le plus constant demeure toutefois le lien prédictif entre le contrôle-discipline et l’appartenance aux trajectoires de consommation élevée, simples ou mixtes. Encore une fois, ces résultats sont intrigants, car ils suggèrent qu’une pratique parentale excessivement rigide pourrait entraîner une hausse de consommation de SUP ou une augmentation de la pratique de JHA, indépendamment du niveau d’impulsivité. Une possibilité est que le contrôle-discipline soit perçu par l’enfant comme un obstacle à sa quête d’autonomie, ce qui est susceptible d’entraîner le développement de problèmes d’opposition (Hollenstein, Granic, Stoolmiller, & Snyder, 2004) et, éventuellement, l’adoption de comportements déviants tels une consommation de SUP ou une participation à des JHA (Shaffer, Wood, & Willoughby, 2005). Il est également plausible d’envisager qu’un niveau de contrôle-discipline élevé représente une réaction de certains parents par rapport à une quête d’autonomie et l’adoption précoce de comportements déviants de la part de leur adolescent.
Implications pour le DSM-V
Les résultats actuels appuient la proposition du DSM-V de traiter les problèmes de JHA comme une addiction comportementale sans substance. En effet, les trajectoires précoces de participation à des JHA et les trajectoires précoces de consommation de SUP se chevauchent de façon importante et elles partagent des facteurs étiologiques communs, incluant une forte composante génétique et une composante environnementale non partagée dans chaque cas. Toutefois, cet appui est partiel, car le chevauchement n’est pas parfait : plusieurs jeunes de 13 à 15 ans cheminent seulement sur une trajectoire élevée de JHA ou une trajectoire élevée de SUP. Par ailleurs, la présence commune d’une forte composante génétique et d’une composante environnementale non partagée en lien avec les trajectoires précoces de JHA et les trajectoires précoces de SUP ne signifie pas que ce sont les mêmes gènes et les mêmes facteurs liés à l’environnement non partagés qui sont impliqués. Pour cela, une approche bivariée et des modèles Cholesky sont requis. Ces éléments feront l’objet d’un article ultérieur.
Limites et pistes futures de recherche
Comme dans toute étude, celle-ci comporte des forces et des limites. Une des forces importantes de cette étude concerne l’utilisation d’un devis de jumeaux avec une perspective longitudinale. En retour, seulement trois temps de mesure ont été recueillis par rapport à la consommation de SUP et la participation à des JHA. De plus, une seule source d’information a été utilisée pour chaque catégorie de mesure, même si cette source n’est pas la même à travers les catégories de mesure : le jeune pour la consommation de SUP et la participation à des JHA, la mère par rapport aux variables sociodémographiques et aux pratiques parentales et les enseignants par rapport à l’impulsivité. Par ailleurs, la taille modeste de l’échantillon n’a pas permis de vérifier si les résultats des analyses de génétique quantitative s’appliquaient de la même manière aux garçons et aux filles. Finalement, la taille modeste de l’échantillon, conjuguée au jeune âge des participants, n’a pas permis d’étendre les analyses aux problèmes associés aux trajectoires de SUP ou de JHA. Ceci sera toutefois possible au cours des prochaines années alors que la consommation précoce de SUP et la participation précoce à des JHA amèneront leur lot de problèmes respectifs (Wanner et al., 2006). Pour l’instant, force est de constater que, même si les participants qui cheminent sur une trajectoire élevée de consommation de SUP et/ou de JHA n’affichent pas, en moyenne, des niveaux excessifs ou pathologiques, certains jeunes présentent néanmoins des cotes relativement élevées. Malgré ces limites, il ressort assez clairement de cette étude que les trajectoires de consommation de SUP et de participation à des JHA au début de l’adolescence se chevauchent, qu’elles ont chacune une forte composante génétique et qu’elles peuvent être prédites très tôt par une combinaison de facteurs d’ordre personnel et d’ordre socio-familial.
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Tableaux
Tableau 1 : Résultats des modèles univariés
Tableau 2 : Régressions logistiques : liens entre les prédicteurs et les différents groupes (groupe de référence : « jeu faible/consommation de substances faible »)
Figure 1
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