OLIVIER SIMON, JÉRÉMIE BLASER, STÉPHANIE MÜLLER, MAUDE WAELCHLI /
Olivier Simon, Médecin – chargé de cours à l’Université de Lausanne, Centre du jeu excessif, Service de psychiatrie communautaire, Centre hospitalier universitaire vaudois

Jérémie Blaser, Médecin, Centre du jeu excessif, Service de psychiatrie communautaire, Centre hospitalier universitaire vaudois

Stéphanie Müller, Psychologue, Centre du jeu excessif, Service de psychiatrie communautaire, Centre hospitalier universitaire vaudois

Maude Waelchli, Psychologue, Centre du jeu excessif, Service de psychiatrie communautaire, Centre hospitalier universitaire vaudois, Consultante en éthique, Hôpital Riviera-Chablais

Correspondance : Olivier Simon, Médecin – chargé de cours à l’Université de Lausanne
Centre du jeu excessif, Service de psychiatrie communautaire
Centre hospitalier universitaire vaudois
7, rue Saint-Martin
CH-1003 Lausanne
Olivier.Simon@Chuv.ch

Résumé

Initialement associé à l’approche de santé publique des drogues illégales, le concept de réduction des risques et dommages (RDR) a été défini par des programmes et des pratiques visant à réduire les conséquences négatives des conduites addictives sur les plans sanitaire, social et économique, et ce, sur la base d’indicateurs scientifiquement pertinents. En matière de jeu excessif, l’approche de santé publique demeure le parent pauvre et le concept de RDR n’a été implanté que de manière marginale, subordonnée à des politiques soucieuses de maximiser les recettes de l’État. En Suisse, la révision de la législation sur les jeux d’argent réactualise la question de la RDR appliquée au jeu excessif. En érigeant la protection des joueurs au rang d’objectif premier du dispositif projeté, le gouvernement suisse a contraint ses réseaux de prévention à revenir sur les fondements de la RDR, à considérer l’efficience des différentes mesures de prévention du jeu excessif et à faire un bilan critique du dispositif de régulation préexistant. Si l’addiction aux jeux d’argent est aujourd’hui reconnue comme une maladie, il y a lieu d’interroger la responsabilité de l’État sous l’angle du droit à la santé. Cependant, il existe un conflit structurel entre la perception de la santé publique et la perception des opérateurs de jeu, qui ont des impératifs économiques de rentabilité. Pour la santé publique, la liberté économique des opérateurs est, par définition, restreinte par l’intervention de l’État, car les opérateurs remplissent la fonction d’auxiliaires chargés d’offrir un jeu à moindre risque par des monopoles d’État ou des régimes d’octroi de licences. Pour les opérateurs, il s’agit d’abord de préserver la liberté économique. Un débat sur les nouveaux cadres de régulation et une redéfinition des objectifs des politiques publiques concernant les jeux d’argent apparaissent inévitables.

Mots-clés : Jeu pathologique, jeu excessif, addiction, réduction des risques et dommages, suisse, prévention, santé publique, jeu responsable

Reducing risks and gambling in Switzerland

Abstract

The concept of Harm Reduction (HR) was initially associated with the public health approach towards illegal drugs. This concept has been defined as programmes and practices to reduce the negative consequences of addictive drives upon health, social and economic functioning. Such reductions are based upon observations of scientifically relevant indicators. Regarding excessive gambling, the public health approach remains largely overlooked. The concept of RR has only been implemented in a marginal way, subordinate to policies concerned with maximizing the State’s income. In Switzerland, the revision of gambling legislation once again raises the question of applying HR to excessive gambling. By placing the protection of players as a projected primary objective, the Swiss government forces its prevention networks to return to HR foundation, to draw attention on the effectiveness of different prevention measures for excessive gambling, and to make a critical evaluation of pre–existing regulation practices. Today gambling addiction is recognized as an illness, and in doing so, an obligation for the State as a right to health issue. However, there is an existing structural conflict between the public health perspective and that of gambling operators, whose economic aim is to make profit. For public health, the economic freedom of operators is, by definition, restricted by the intervention of the State. The operators fulfill the role of auxiliaries, charged with the responsibility of providing a game with less risk, by State monopolies or grant licensing regimes. For the operators, such a vision hinders their hopes of economic freedom. A debate on the new regulating framework and a redefinition of the objectives of public policies towards gambling appears inevitable.

Key words: gambling, pathological gambling, addiction, harm reduction, switzerland, prevention, public health, responsible gambling

Reducción de riesgos y juegos por dinero en Suiza

Resumen

Relacionado en un principio con el enfoque de salud pública sobre drogas ilegales, el concepto de reducción de riesgos y daños (RDR) fue definido por programas y prácticas destinados a reducir las consecuencias negativas de los comportamientos adictivos en los planos sanitario, social y económico, sobre la base de indicadores específicamente pertinentes. En materia de juego excesivo, el enfoque de salud pública continúa siendo el pariente pobre y el concepto de RDR fue implantado solamente de manera marginal, subordinado a políticas preocupadas por maximizar los ingresos del Estado. En Suiza, la revisión de la legislación sobre los juegos por dinero reactualiza la cuestión de la RDR aplicada al juego excesivo. Colocando la protección de los jugadores en el rango de primer objetivo del dispositivo proyectado, el Gobierno suizo ha obligado a sus redes de prevención a volver a considerar los fundamentos de la RDR y la eficacia de las diferentes medidas de prevención del juego excesivo y a hacer un balance crítico del dispositivo de reglamentación preexistente. Si se reconoce en la actualidad que la adicción a los juegos por dinero es una enfermedad, este hecho permite interrogar la responsabilidad del Estado desde el punto de vista del derecho a la salud. Sin embargo, existe un conflicto estructural entre la percepción de la salud pública y la percepción de los operadores de juego, que tienen imperativos económicos de rentabilidad. Para la salud pública, la libertad económica de estos operadores está, por definición, limitada por la intervención del Estado, puesto que los mismos cumplen la función de auxiliares, encargados de ofrecer un juego con menos riesgos para los monopolios del Estado o los regímenes de otorgamiento de licencias. Para los operadores, se trata en primer lugar de preservar la libertad económica. Parece inevitable en este contexto la necesidad de mantener un debate sobre los nuevos marcos regulatorios y la redefinición de los objetivos de las políticas públicas en lo que respecta a los juegos por dinero.

Palabras clave: juego patológico, juego excesivo, adicción, reducción de los riesgos y daños, Suiza, prevención, salud pública, juego responsable

Introduction – Les jeux d’argent entre responsabilité d’entreprise et responsabilité de l’État

Les jeux de hasard et d’argent (ci-après JHA) ont une histoire très ancienne et existent dans toutes les cultures. Ils englobent tout type de jeux qui engage une mise irréversible d’un objet de valeur et dont l’issue dépend principalement du hasard. Ils recouvrent aujourd’hui des offres aussi variées que les jeux exploités dans des casinos, les jeux de loteries, les paris sportifs ou autres ainsi que les jeux pratiqués dans des cercles plus ou moins fermés, comme le très populaire poker. Avec les nouvelles technologies, les JHA se développent sur des supports de communication électroniques qui contribuent à les rendre plus accessibles, mais également plus addictifs (Parke & Griffiths, 2006).

Spécificités des dommages des jeux d’argent

Les conséquences socialement dommageables du jeu excessif sont rapportées depuis l’antiquité (Schädler, 2010). Les premières descriptions médicales modernes de l’addiction au jeu remontent au 19e siècle. Défini par la présence de symptômes d’addiction (signes de sevrage psychologique et de tolérance nécessitant d’augmenter le degré d’engagement pour atteindre le niveau de stimulation recherché), de symptômes obsessifs (préoccupation envahissante) et de symptômes impulsifs (reproduction du comportement de jeu en dépit des conséquences), le jeu excessif concerne 1 % à 4 % de la population adulte dans les pays occidentaux (Stucki & Rihs-Middel, 2007). La pratique des jeux d’argent est associée à un risque élevé de conflits avec l’entourage et d’isolement social (Ferland, Fournier, Ladouceur, Brochu, Bouchard, & Paquet, 2008), de difficultés financières, de pertes de productivité, de stress, d’anxiété, de dépression et de sentiment de culpabilité, de perturbation du sommeil, d’abus de substances, de problèmes judiciaires (Fong, 2005 ; Oliveira, Silveira & Silva, 2008) et de conduites suicidaires (Chen & al., 2006 ; Wong, Cheung, Conner, Conwell & Yip, 2010).

Par rapport aux addictions aux substances psychoactives, la phénoménologie du jeu excessif se distingue par plusieurs éléments. Tout d’abord, il n’existe pas de toxicité directe, ni à court terme ni à plus long terme, et les symptômes sont donc peu ou pas visibles pour l’entourage. Deuxièmement, il n’existe pas de seuils quantitatifs (par exemple, durée passée ou argent misé) permettant de définir un usage « à risque », largement dépendant des moyens financiers de la personne joueuse. Troisièmement, la place centrale de la perte d’argent dans le développement du trouble amplifie les conséquences pour l’entourage : on estime que pour un joueur problématique, 5 à 17 personnes sont touchées parmi les proches (Kalischuk, Nowatzki, Cardwell, Klein & Solowoniuk, 2006). Enfin, comparativement aux conduites addictives liées aux substances, la fraction des personnes touchées demandeuses d’aide est moindre, comprise entre 2 % et 10 % selon les études (Bouju, Grall-Bronnec, Landreat-Guillou & Venisse, 2011 ; Cunningham, 2005 ; Slutske, 2006).

De la responsabilité sociale d’entreprise en matière de jeux d’argent

Le domaine de la prévention et du traitement du jeu excessif présente lui aussi d’importantes spécificités par rapport aux dispositifs « addictions » du domaine des substances. La médicalisation du jeu excessif s’est construite largement à l’initiative de l’industrie du jeu elle-même, sur la base de la notion de responsabilité sociale d’entreprise (RSE). La RSE est un « concept dans lequel les entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales et économiques dans leurs activités et dans leurs interactions avec leurs parties prenantes » (Commission européenne, 2011). La RSE a conduit les opérateurs de jeux à solliciter des professionnels de la santé pour développer des actions de prévention cohérentes avec les préoccupations des industriels, dans une perspective de « protection du consommateur », afin de garantir un développement économique durable du secteur. Dans la plupart des juridictions, cet engagement des opérateurs en matière de RSE a progressivement intégré les législations sur les jeux d’argent, principalement en matière d’information, de détection précoce et de contrôle d’accès aux offres de jeux réputées être les plus dangereuses. C’est ainsi qu’après une première série de réformes au début des années 2000, la Suisse vient d’engager une nouvelle révision en profondeur de son dispositif de régulation des JHA.

Objectifs de la contribution

L’intégration dans la législation de nouvelles normes visant à protéger les joueurs est une opportunité, pour les milieux de prévention, de se pencher sur les fondements de l’approche de santé publique du domaine des addictions. Après un retour sur les différentes définitions de la RDR, le texte passera en revue les connaissances en prévention du jeu excessif avec, comme cadre d’analyse, la triade épidémiologique objet d’addiction – personnes touchées – environnement et de ses interfaces opérateurs – état – dispositifs de prévention et traitement. Les grandes lignes du dispositif suisse seront ensuite présentées ainsi que les principes qui sous-tendent sa révision. Puis, sera discutée la compatibilité de ces principes avec ce qu’il conviendrait d’appeler une « politique » de réduction des risques et des dommages liés au jeu excessif.

Définir l’approche de réduction des risques et des dommages

La Harm Reduction Coalition a défini la RDR comme un ensemble de stratégies pratiques visant la rencontre des usagers de drogue « là où ils sont » afin de les aider à réduire les dommages liés à leur consommation (HRC, 1996). Les points principaux de la RDR, mentionnés dans le document de la HRC, sont les suivants : accepter que la consommation existe et choisir de réduire les dommages et les risques qui y sont liés plutôt que d’ignorer ou de condamner ce phénomène ; s’assurer que les consommateurs puissent participer à l’élaboration des programmes et des politiques qui les concernent ; comprendre la consommation de substances psychotropes comme un phénomène présentant de multiples facettes, en un continuum de l’abstinence à l’abus sévère, reconnaître que certaines façons de consommer sont plus sûres que d’autres ; reconnaître que des facteurs tels que la précarité économique, le statut socio-économique, la discrimination raciale, l’isolement social, les traumatismes passés et d’autres inégalités ont une influence sur la vulnérabilité des personnes et sur leur capacité à faire face aux dommages liés à la consommation de substances. Les buts de la RDR sont donc non seulement de réduire les conséquences négatives liées à la consommation, mais aussi les dommages collatéraux susceptibles de résulter des politiques mises en œuvre. Cela comprend notamment les conséquences négatives induites par la création d’importants marchés illégaux ou de marchés légaux sans aucune régulation et, en particulier, sans dispositions relatives à la sécurité des consommateurs (Marlatt, 1998).

D’un point de vue historique, Beauchet & Morel (2010) distinguent trois phases dans le développement de l’approche de la RDR. La première génération avait comme objectif la prévention du SIDA, en assurant notamment l’accès à des seringues stériles et au traitement de substitution à la méthadone ; la deuxième génération a visé la prévention en milieu festif par une meilleure information sur les substances psychotropes et leurs effets et en proposant le contrôle des principes actifs en circulation (testing) ; la troisième génération vise à élargir le périmètre des addictions concernées (en intégrant notamment l’alcool et le tabac) et propose de renoncer à la notion d’abstinence comme principe phare pour promouvoir à la place des pratiques de consommation à moindres risques. Dans cette perspective, la RDR pourrait se définir comme une politique « qui scelle une alliance nouvelle entre la santé publique, l’éducation et les régulations légales pour un même objectif : diminuer les risques et les dommages » (Morel, Chappard & Couteron, 2012).

Définition de l’International Harm Reduction Association

La définition de la RDR la plus couramment citée à ce jour est celle proposée par l’Association internationale de réduction des risques (IHRA). Selon cette dernière, la RDR « concerne les lois, les programmes et les pratiques qui visent principalement à réduire les conséquences négatives liées à la consommation de drogues légales ou illégales, tant au niveau de la santé qu’au niveau socio-économique, sans nécessairement diminuer la consommation de drogues. La RDR bénéficie aux personnes qui consomment des drogues, à leur famille ainsi qu’à la communauté. L’approche de RDR est basée sur un solide engagement envers la santé publique et les droits humains. » (IHRA, 2010).

Cette définition introduit plusieurs éléments. Tout d’abord, elle oppose le niveau des législations et programmes à celui des pratiques. Cela permet de distinguer les « mesures » de RDR qui visent un type de dommages bien spécifique, des « politiques » de RDR qui visent un ensemble de dommages en ciblant la charge des problèmes au sens le plus large. Deuxièmement, l’approche de RDR peut s’appliquer indifféremment aux substances légales ou illégales ainsi qu’à d’autres objets susceptibles d’engendrer des conduites addictives ou des comportements à risque. Troisièmement, il ne s’agit pas nécessairement de réduire la consommation (ce qui n’exclut pas pour autant des stratégies qui viseraient cet objectif, puisque dans de nombreuses conduites addictives, réduire la fréquence et l’intensité du comportement addictif contribue mécaniquement à en réduire les conséquences). Quatrièmement, la RDR vise également l’entourage des consommateurs et prend en considération la réduction des dommages sur le plan sociétal. Enfin, point de grande importance dans des domaines d’intervention nouveaux pour la RDR : l’approche trouve son ancrage légal dans le droit constitutionnel et dans le droit international, en particulier dans les dispositions relatives au droit à la santé.

Si l’on s’en tient à la définition proposée par l’IHRA, la RDR n’exclut pas des approches de prohibition ciblées (par exemple liées à l’âge, à l’accessibilité géographique et horaire, aux formes les plus addictives d’un objet d’addiction donné). La RDR n’exclut pas non plus une offre de soins visant l’abstinence. L’approche de la RDR prétend, en revanche, redéfinir les priorités de telles offres en fonction d’un objectif visant à toucher l’ensemble du public concerné, à commencer par la grande majorité d’usagers problématiques qui n’exprime aucune demande d’aide.

Définitions de la réduction des risques dans le domaine du jeu excessif

En matière de jeu excessif, la RDR a été tantôt assimilée, tantôt opposée à la notion de « jeu responsable ». Selon Blaszczynski (2012), les stratégies de jeu responsable visent à mettre sur le marché des offres de jeux d’argent assurant la transparence et la sécurité des transactions, en donnant notamment suffisamment d’informations aux joueurs, de telle sorte qu’ils puissent procéder à des choix appropriés. Plutôt que d’employer le terme harm reduction, des chercheurs anglo-saxons du domaine lui ont préféré le terme de harm minimisation. Cette nuance suggère une notion d’optimum de réduction. Les buts d’une approche de harm minimisation ont été définis en ces termes (Blaszczynski, 2001 cité par IPART, 2004) : prévenir le développement de comportements de jeu problématiques chez les personnes à risque ; réduire la prévalence du trouble ; réduire les conséquences sociales négatives pour les joueurs, leur famille et la communauté ; préserver un niveau de plaisir satisfaisant pour les joueurs récréatifs ; éviter de compromettre de manière non nécessaire les intérêts de l’industrie.

D’un point de vue pratique, d’autres chercheurs du domaine du jeu excessif (Cantinotti & Ladouceur, 2008) élargissent le périmètre de la RDR à des mesures de réduction de la demande (campagnes médiatiques, augmentation des prix, restrictions des opportunités, modifications du design des jeux électroniques, limitation des possibilités de retraits d’argent sur les lieux de jeu, restriction de la publicité) et à des mesures de réduction de l’offre (limitations de l’accessibilité physique des jeux, des horaires, de la consommation d’alcool ou de tabac, auto-exclusion, voire prohibition des offres les plus dangereuses).

La perspective de « jeu responsable » en matière de RDR ne fait l’objet d’aucun consensus. Ses détracteurs relèvent les limites cliniques du mythe du joueur informé et libre de ses choix. Ils soulignent que, si la recherche a établi des facteurs de risque statistiques, il est en revanche impossible d’identifier au sein d’un groupe de joueurs réguliers quelles sont les personnes qui vont effectivement développer une addiction. De facto, l’ensemble des joueurs réguliers représente l’un des principaux publics à risque. De plus, la prise en compte des intérêts de l’industrie introduit une possible confusion d’objectifs entre promotion de la santé et préservation de la liberté économique dans un objectif de rentabilité.

Stratégies de prévention étudiées dans le domaine du jeu excessif

L’approche médicale traditionnelle de la prévention distingue les interventions en fonction de la temporalité de développement des troubles (prévention primaire, secondaire, tertiaire). L’approche de santé publique tend à distinguer les publics cibles (prévention universelle, sélective, indiquée) et à séparer les interventions éducationnelles des interventions structurelles. La prévention éducationnelle (appelée aussi prévention comportementale) regroupe les mesures centrées sur la personne, notamment l’information du joueur en tant que consommateur. La prévention structurelle inclut des mesures législatives et réglementaires, indépendamment de la décision individuelle de jouer. Toutefois, des interventions de type éducationnel peuvent avoir une composante structurelle dans la mesure où elles sont prévues par la loi. Cela peut, par exemple, être le cas des mesures de sensibilisation prévues par les programmes scolaires ou encore des mesures de formation du personnel au contact des joueurs.

Les mesures de prévention aux interfaces de la triade épidémiologique – cadre d’analyse

Aucun des systèmes de classification précédents ne permet de distinguer de manière satisfaisante les mesures incombant essentiellement aux opérateurs, des mesures plus larges relatives aux systèmes de soins ou aux législations sur la santé. Pour notre discussion du modèle helvétique, nous avons retenu le modèle traditionnel de la triade épidémiologique agent-sujet-environnement, qui permet de distribuer les mesures autour de trois articulations : (1) l’articulation entre l’industrie du jeu et le joueur, à travers les mesures mises en œuvre dans le périmètre des opérateurs ; (2) l’articulation entre l’environnement et le joueur, à travers les mesures mises en œuvre en dehors des opérateurs par des programmes d’aide et prévention ; (3) l’articulation entre l’environnement et les opérateurs, à travers les politiques publiques soutenant les deux articulations précédentes (avec la législation relative au JHA, d’une part, et les législations relatives à la santé et aux addictions d’autre part). Les figures 1 et 2 permettent de visualiser sur ces trois articulations des mesures de prévention courantes en matière de substances (fig. 1) et en matière de JHA (fig. 2). Cette modélisation présente en particulier l’avantage de mettre en exergue les bases légales et la responsabilité de mise en œuvre aux plans institutionnel et financier.

Figure 1 – Triade épidémiologique et mesures de RDR liées à la consommation de substances psycho-actives

Figure 2 – Triade épidémiologique et mesures de RDR  potentielles pour le développement  d’une politique  coordonnée de RDR du jeu excessif

 

Mesures mises en œuvre par l’opérateur

Il faut comprendre ici les mesures mises en place plus ou moins spontanément par les opérateurs et qui comportent : les interventions sur les lieux de jeux auprès des joueurs à risque ; les modifications relatives à l’ambiance des lieux de jeu (sons, musique, lumières, couleurs, horloges, fenêtres, etc.) ; les restrictions d’accès à l’argent liquide ; les interventions automatiques informatisées ; les mesures modifiant le paramétrage des offres de jeux électroniques ; les stratégies de préengagement et les mesures d’auto-exclusion.

Les récents apports de la recherche mettent en relief les caractéristiques structurelles des jeux. La fréquence des évènements de jeu (c’est-à-dire le nombre de parties jouées par unité de temps) a été le domaine le plus étudié et semble être un élément clé du potentiel addictif d’une offre donnée (Griffiths & Parke, 2010). La fréquence de jeu en corrélation avec le South Oaks Gambling Screen (SOGS) et est plus élevée chez les joueurs pathologiques (Linnet, Thomsen, Møller & Callesen, 2013). En ce qui concerne les modifications qui pourraient limiter le potentiel d’addiction aux jeux, il a, par exemple, été montré que la diminution de la fréquence de deux à trois secondes permet de réduire le nombre de joueurs qui ont joué jusqu’à la fin du temps imparti. De plus, une diminution du taux de retour paraît associée à une diminution du temps de jeu, lorsque la fréquence de l’évènement est également diminuée (Linnet, Thomsen, Møller & Callesen, 2010). D’autres paramètres structurels ont par ailleurs été identifiés par les chercheurs comme étant associés au potentiel addictif : le degré d’interactivité, les renforçateurs de l’illusion de contrôle, la hauteur des mises et la structure d’attribution des gains (Haefeli, Lischer & Schwarz, 2011). Le développement des connaissances dans ces domaines est indispensable pour mieux cerner les paramètres influençant le potentiel de risque. Idéalement, il s’agit de limiter ce potentiel de risque sans pour autant rendre les jeux peu attrayants au point d’encourager le jeu illégal.

Les stratégies de préengagement visent la détermination d’un temps, d’une fréquence ou d’un montant maximal avant de commencer à jouer. En effet, il a été mis en évidence que, chez des joueurs de poker en ligne, la fixation de limites de temps est plus efficace que la limitation des mises ; au contraire, pour les autres joueurs, les limites de mises sont plus efficaces que les limites de temps (Auer & Griffiths, 2013). Par ailleurs, il a également été confirmé que les joueurs pathologiques sont moins enclins que les joueurs non pathologiques à se fixer des limites préétablies et qu’ils sont aussi moins disposés à utiliser une smart-card (ou toute autre stratégie visant à limiter l’accès à l’argent durant une séance), alors même qu’ils rapportent perdre la notion de l’argent durant le jeu et ne pas savoir s’ils étaient en train de gagner ou de perdre (Nower & Blaszczynski, 2010). L’efficacité des stratégies de préengagement dépend néanmoins de la motivation du joueur excessif si elles sont mises en œuvre sur une base volontaire. En ce qui concerne les jeux en ligne, l’organisation des opérateurs ne fonctionne pas comme un système intégré et peut facilement permettre au joueur de passer d’un site à l’autre.

Concernant l’auto-exclusion des joueurs, il apparaît que la plupart des joueurs auto-exclus seraient des joueurs à risques ou pathologiques (Hayer & Meyer, 2011b). Les raisons invoquées pour demander l’auto-exclusion sont principalement les problèmes d’argent, le temps passé au casino et les problèmes familiaux. Les études montrent un taux d’abstinence de jeu chez 13 % à 30 % des joueurs durant l’exclusion avec une diminution significative des conséquences négatives pour ceux qui continuent à jouer malgré l’interdiction, et ce, déjà quatre semaines après le début de la mesure et avec un maintien à un an. Pour la majorité des joueurs, l’exclusion surviendrait toutefois trop tardivement (Hayer & Meyer, 2011b). En matière de casinos en ligne, il est décrit que les joueurs s’excluant sont généralement plus jeunes, avec moins de conséquences négatives vécues que ceux des casinos terrestres. Il est probable que l’exclusion d’un casino en ligne est une démarche plus facile à réaliser et surviendrait donc plus précocement (Griffiths, Wood, & Parke, 2009 ; Hayer & Meyer, 2011a).

Dans une revue de littérature de référence (Williams, West & Simpson, 2012), les stratégies de prévention qui sont considérées comme validées concernent les restrictions d’accès à l’argent liquide ainsi que la limitation des pertes maximales. Selon un groupe d’utilisateurs d’EGM (Electronic Gaming Machines) australiens, la restriction d’accès à l’argent liquide serait la mesure de réduction des risques la plus efficace (Caraniche Pty Ltd, 2005). Pour ce qui est de la fixation d’un seuil de perte maximale, il importe de souligner qu’il est possible de le déterminer selon une base journalière, hebdomadaire ou mensuelle. Meyer, Hayer & Griffiths (2009) signalent que, en Norvège, ce système a été combiné avec l’utilisation d’une smart-card (stratégie de préengagement).

Dès lors que la mise en œuvre des stratégies de préengagement et des mesures d’auto-exclusion repose sur la bonne volonté des opérateurs, elle se trouve limitée par le conflit d’intérêts lié à la contribution élevée des joueurs problématiques aux recettes des jeux (Adams, Buetow & Rossen, 2010 ; Wood & Williams, 2007). Dans leur rapport, Williams et al. (2012) placent au premier rang de leurs recommandations l’acceptation qu’aucune mesure de prévention du jeu excessif ne peut atteindre son objectif sans avoir un impact sur les revenus des opérateurs.

Dispositifs d’aide et de prévention externes aux opérateurs

Les principales « mesures externes » décrites à ce jour comportent les interventions suivantes : la création de lieux d’aide spécialisée, la formation et l’enseignement, les campagnes de sensibilisation grand public, les associations d’auto-support, les stratégies pour articuler les lieux de jeux et les lieux d’aide.

L’accès aux dispositifs d’aide et de soins demeure un maillon faible du dispositif de prévention secondaire en matière de jeu excessif. La fraction des joueurs pathologiques qui consultent est réduite et se situe en deçà de 10 % (Bouju, Grall-Bronnec, Landreat-Guillou & Venisse, 2011 ; Cunningham, 2005 ; Slutske, 2006). Il y a un consensus sur l’importance de développer une offre dite « à seuil bas » avec des prestations mobiles et, en particulier, la possibilité de se déplacer auprès des lieux de jeux pour établir le premier contact avec des personnes en situation de crise par rapport à leur comportement de jeu. L’importance de proposer des programmes ne visant pas uniquement l’abstinence et prévoyant la possibilité de viser un jeu contrôlé a également été décrite de même que la pertinence des approches motivationnelles et des offres ciblant les besoins des proches des joueurs (Ladouceur, 2005 ; Gooding & Tarrier, 2009).

En matière de formation-enseignement, indépendamment de celle du personnel des lieux de jeux déjà évoquée, il y a lieu d’implanter le jeu excessif dans l’ensemble des filières de formation socio-sanitaires. Il convient aussi de sensibiliser d’autres catégories de professionnels susceptibles d’entrer en contact avec des joueurs excessifs ou leur entourage comme, par exemple, celles des ressources humaines ou du secteur judiciaire. Il est à noter que ces efforts ne sont pratiquement pas décrits dans la littérature (Centre du jeu excessif, 2011).

Pour ce qui est de la prévention par l’information auprès du public, deux domaines principaux ont été plus particulièrement étudiés : les campagnes grand public et les interventions en milieu scolaire. Il est relevé que les premières peuvent être un moyen peu coûteux pour faire passer à large échelle des messages de promotion de la santé et de prévention, ce qui peut contrecarrer les efforts déployés par les opérateurs afin de promouvoir leurs produits (Williams et al. 2012). Cependant, si des changements dans les connaissances et les attitudes du public sont documentés, les travaux d’évaluation réalisés prennent rarement en considération des critères de modification des comportements. Un domaine de prévention indirecte mal documenté concerne l’impact de l’accès au crédit et aux moyens de paiement électronique prépayé, tout particulièrement chez les adolescents et les jeunes adultes.

Mesures législatives et réglementaires

Les mesures appartenant à cette catégorie sont celles qui requièrent une régulation étatique par le biais de normes et de financement public. Comme relevé précédemment, les mesures peuvent être distinguées en deux grandes catégories : celles relevant des législations relatives aux JHA et celles relevant des législations relatives au droit à la santé.

Sur le plan international, la régulation du secteur des jeux d’argent est basée sur des critères très variés (Villeneuve, 2011) : la prépondérance de l’habileté ou celle du hasard (ou encore uniquement la présence du hasard, selon les pays) pour soumettre un jeu à un type de réglementation précise ; l’application par région ou pour tout le territoire national ; la distinction – ou pas – de la réglementation des jeux de loterie ou de casinos ; l’interdiction globale ou l’autorisation de jouer faite aux personnes étrangères à la juridiction où les jeux sont exploités ; les conditions variables d’appropriation et de réaffectation des bénéfices provenant de l’industrie des jeux. Parmi ces critères, signalons que les mesures relatives à la prévention du jeu excessif ne sont habituellement considérées que de manière marginale.

Parmi les mesures de prévention fortement dépendantes du cadre légal encadrant les jeux, on peut distinguer les catégories suivantes : les restrictions du nombre de points de vente, les restrictions des jeux considérés comme présentant un haut potentiel de risque, les restrictions des personnes autorisées à jouer et les restrictions relatives à la publicité. Ces mesures sont globalement considérées comme valides sur le plan de la recherche en santé publique (Williams et al. 2012), et d’efficacité supérieure aux approches fondées sur l’information et la sensibilisation.

Certaines législations sur les jeux d’argent prévoient une taxation sur le revenu des jeux dans le but de financer des mesures de prévention externes aux opérateurs (Meyer, 2009). De tels prélèvements ont le mérite de constituer une alternative qui semble plus facile à mettre en œuvre sur le plan politique que d’allouer des fonds au jeu excessif à partir des budgets ordinaires des services de santé. Il en résulte un questionnement éthique puisque ce système rendrait les services de santé directement tributaires d’une éventuelle baisse des recettes des opérateurs. Ce risque est tempéré par le principe de réalisation progressive des obligations de l’État en matière de droit à la santé qui fait qu’une fois que des nouveaux dispositifs de santé sont mis sur pied, l’État est tenu de maintenir ces prestations (Conseil économique et social des Nations Unies, 2000).

Le dispositif suisse de prévention structurelle du jeu excessif

La Suisse est un pays d’une population d’environ 7 800 000 personnes résidentes (OFS, 2010), organisée en une fédération de 26 micro-états appelés cantons et comprenant quatre régions linguistiques. La Suisse dispose, selon les cantons, de services de santé très différenciés en matière de troubles liés aux substances, avec un engagement dans la RDR liée à l’usage de drogue par voie intraveineuse depuis la fin des années 80, porté par la politique publique fédérale dite des quatre piliers (OFSP, 2010). La prise en considération du jeu excessif comme problème de santé publique remonte au début des années 2000.

Historiquement, les jeux d’argent ont été prohibés par une disposition introduite dans la Constitution suisse en 1874. Les seules exceptions ont été certains jeux à mises limitées autorisés dans des établissements appelés Kursaals, situés dans des lieux touristiques, et des jeux de loteries et paris exploités dans le cadre de monopoles d’État aux termes d’une loi datant de 1923 (Villeneuve, 2010).

Incidences de la Loi fédérale sur les maisons de jeu (LMJ)

À la suite du vote populaire de 1993, le gouvernement suisse levait l’interdiction d’exploiter des casinos datant de 1877 et, en 1998, la Loi fédérale sur les maisons de jeu (LMJ, 1998) voyait le jour. Cette loi prévoit un système d’octroi de licences subordonné, selon son article 14, à l’existence d’un programme de mesures sociales par lequel « l’exploitant définit les mesures qu’il entend prendre pour prévenir les conséquences socialement dommageables du jeu ou y remédier ». Dans l’article 37 de l’ordonnance d’application de la loi, il est prévu que « la maison de jeu collabore avec un centre de prévention des dépendances et avec un établissement thérapeutique pour la mise en œuvre du programme de mesures sociales » (OLMJ, 2000). La LMJ interdit le jeu aux mineurs (article 21), mentionne la possibilité de demander son exclusion (article 22), impose aux maisons de jeux d’exclure les personnes qui engagent des mises sans rapport avec leur revenu et leur fortune, de contrôler l’identité à l’entrée ainsi que de tenir un registre des personnes exclues (article 24). Les casinos doivent, en outre, « s’abstenir de toute publicité outrancière » (article 33). La LMJ interdit encore l’exploitation de casinos sur Internet (article 5). Sur ces bases légales, une vingtaine d’établissements ont ouvert leurs portes à partir de 2001.

En pratique, cette législation a produit un accent sur la formation du personnel en contact avec les joueurs. Des critères empiriques ont été mis sur pied pour assurer la détection précoce des joueurs potentiellement problématiques dans les salles de jeux. Un nombre croissant de joueurs ont fait l’objet de mesures d’exclusion pour atteindre, en 2011, 32 400 personnes (CFMJ, 2013). Parallèlement, des mesures appelées « conventions de visites » ont été développées. Elles permettent aux joueurs de prédéfinir la fréquence et la durée de leurs visites ainsi que les montants misés. Ces mesures ont été cependant abandonnées par la plupart des établissements en raison des difficultés de mise en œuvre. Ce cadre légal a contribué indirectement à l’émergence de deux centres de compétences universitaires rattachés aux départements de psychiatrie de Lausanne et de Bâle.

Incidences de la Convention intercantonale sur les loteries et paris (CILP)

Parallèlement à la mise en œuvre de la LMJ, la Confédération a souhaité mettre sur pied une nouvelle législation du secteur des loteries et paris gérée par les cantons. Une convention intercantonale est entrée en vigueur en 2006. Elle ne prévoit pas explicitement de limitations du public autorisé à jouer (notamment relatives à l’âge ou prévoyant la possibilité de s’exclure). Selon l’article 17 de cette convention, « la commission examine lors de l’homologation le potentiel de dépendance du jeu » et « prend les mesures nécessaires dans l’intérêt de la prévention contre la dépendance et la protection de la jeunesse ». L’article 18 introduit textuellement une « taxe sur la dépendance au jeu », fixée à 0,5 % du revenu brut des jeux de loteries, avec une « obligation » pour les cantons d’utiliser les fonds ainsi dégagés pour réaliser des actions de prévention coordonnées. L’article 19 statue en des termes similaires à la LMJ que « la publicité doit être mesurée ».

En pratique, les loteries ont fixé des limites d’âge : 16 ans pour l’achat de billets à gratter et 18 ans pour l’utilisation des loteries électroniques exploitées par la Loterie suisse romande. Il est à relever que les offres de jeux présentant le plus haut potentiel de risque, à savoir les loteries électroniques, n’ont pas fait l’objet du processus d’homologation prévu à l’article 17, car homologuées antérieurement à l’entrée en vigueur de la CILP. Ceci a donné lieu à d’importantes controverses, l’agence de régulation chargée de contrôler le secteur des casinos estimant que, par certaines caractéristiques, les loteries électroniques relevaient de la loi sur les casinos (voir également à ce sujet la note de bas de page correspondante). Il faut noter aussi que, contrairement aux casinos, les loteries suisses ont la possibilité de vendre leurs produits par Internet.

Le principal effet de la CILP pour la prévention a été la multiplication de centres et des antennes spécialisés. Il en existe dans chaque ville d’importance moyenne. Ont également été créés des services d’assistance téléphonique intercantonaux de type numéro vert[1].

Données d’évaluation du dispositif suisse

Parallèlement à l’introduction de ces législations, le marché suisse des jeux d’argent a connu une expansion considérable. Selon les données publiées par les régulateurs, le revenu brut des loteries et paris est passé de 425 millions de francs en 2003 à 862 millions en 2011 ; le revenu brut des jeux de casinos est passé de 561 millions en 2003 à 824 millions en 2011. En 2011, l’impôt sur les casinos a rapporté 419 millions à la Confédération et aux cantons, montant principalement affecté au financement du système de retraites de base dénommé AVS (CFMJ, 2011). Pour le secteur des loteries et des paris, la même année, 534 millions ont été répartis par les cantons (Comlot, 2011).

Deux enquêtes épidémiologiques réalisées au plan national (Bondolfi, Jermann, Ferrero, Zullino & Osiek, 2008) ont investigué la prévalence du jeu pathologique avant (1998) et après (2005) l’entrée en vigueur de la LMJ et ont observé une stabilité. Toutefois, il y a une méconnaissance de l’état de santé des joueurs et de leur qualité de vie. Plusieurs enquêtes épidémiologiques (Luder, Berchtold, Akré, Michaud & Surís, 2010 ; Surís, Akré, Petzold, Berchtold & Simon, 2011) ont montré des taux de prévalence plus élevés chez les jeunes, similaires aux observations rapportées dans la littérature. Une enquête réalisée par l’Université de Neuchâtel a estimé que les coûts directs et indirects du jeu excessif étaient compris entre 551 et 648 millions de francs suisses par année, à comparer avec les résultats calculés par le même Institut pour les substances illégales (4,118 -millions), l’-alcool (6,192 millions) et le tabac (9,935 millions) (Jeanrenaud, Gay, Kohler, Besson & Simon, 2012 ; Kohler, 2012). Les données relatives aux personnes consultantes sont parcellaires et incomplètes ; elles suggèrent cependant une augmentation lente, mais continue des demandes d’aide spécialisée (Centre du jeu excessif, 2013).

Malheureusement, aucune évaluation scientifique satisfaisante des dispositifs LMJ et CILP n’a pu être réalisée. Deux rapports commandés par le régulateur des casinos fournissent des éléments qualitatifs et des données relatives aux personnes exclues (Künzi, Fritschi & Egger, 2004 ; Künzi, Fritschi, Oesch, Gehrig & Julien, N., 2009). L’agence de surveillance des loteries et paris a fait expertiser par l’Université de Sydney les mesures de jeu responsable développées pour les loteries électroniques (Blaszczynski, 2009). Ce dernier rapport a estimé que les mesures prises correspondaient globalement à des standards élevés, en comparaison internationale ; il a été suggéré d’introduire un mécanisme de contrôle des comportements problématiques des joueurs de loteries électroniques par un mécanisme d’identification de type login[2].

Cadre général de la révision projetée

En 2009, le Département fédéral de justice et police a été mandaté par le gouvernement pour travailler sur un assouplissement de l’interdiction d’exploiter des casinos par Internet et sur l’affectation à l’utilité publique des revenus générés par les jeux d’argent afin d’implémenter un nouvel article constitutionnel relatif aux jeux d’argent. Issu du contre-projet à l’initiative populaire « pour des jeux d’argent au service du bien commun », l’article 106 est entré en vigueur le 11 mars 2012. Il stipule en particulier que « la Confédération et les cantons tiennent compte des dangers inhérents aux jeux d’argent. Ils prennent les dispositions législatives et les mesures de surveillance propres à assurer une protection adaptée aux spécificités des jeux ainsi qu’au lieu et au mode d’exploitation de l’offre».

L’Office fédéral de la justice a mis sur pied un groupe de projet comprenant des représentants de l’industrie des jeux, des agences de régulation et de leurs départements d’affiliation (économie, justice) ainsi que, depuis 2011, un représentant unique des milieux de prévention, délégué des associations interprofessionnelles en dépendances. Le projet d’acte normatif, au terme d’un processus de consultation propre au système politique helvétique, devrait être soumis au parlement au plus tôt au second semestre 2014, avec une nouvelle législation opérationnelle à partir de 2018.

Si l’essentiel des travaux préparatoires demeure confidentiel, le gouvernement suisse a communiqué, en février 2013, les grandes lignes du projet, à savoir : la protection contre la dépendance au jeu, la légalisation des jeux d’argent sur Internet, une refonte de la fiscalité, la création d’une nouvelle structure de régulation chargée de « coordonner » les deux agences de régulation actuelles relatives aux casinos et aux loteries (Communiqué du conseil fédéral, 2013). Les buts annexes à l’objectif premier de protection des joueurs seraient de générer des recettes d’utilité publique, de lutter contre le marché illégal, d’assurer la transparence de l’offre, de répartir les attributions entre le niveau fédéral et les cantons, de redéfinir les différents types de jeux et de donner la souplesse nécessaire au système afin de prendre en considération l’évolution technologique. Les exigences de prévention devraient être déterminées par le régulateur, assisté d’experts, en fonction d’instruments d’évaluation du potentiel de risque et non être fixées dans la loi de manière rigide.

Au moment où ces lignes sont sous presse, le calendrier exact des futures étapes demeure donc incertain. Le cadre de régulation des jeux de casinos en ligne n’a pas suscité de grands débats parmi les milieux de prévention. Un scénario évoqué subordonne l’octroi de concessions de casinos en ligne à la détention préalable d’une concession de casino « terrestre ». Les exigences de prévention pesant sur les opérateurs devraient être calquées strictement sur celles s’appliquant aux jeux terrestres.

Des polémiques ont éclaté au sujet du financement structurel des centres de prévention, qui semble combattu par différents lobbies, qu’il s’agisse des opérateurs ou des interfaces économiques de l’État. Il y a aussi eu une controverse au sujet de l’absence de représentation des services de santé publique dans le groupe de projet (Bourget, 2014). D’après les experts du droit constitutionnel, il semble bien pourtant que le nouvel article constitutionnel pose un cadre très précis quant aux obligations de financement de la prévention et quant à une implication équilibrée des services de santé publique des cantons et de la Confédération (Grisel, 2014).

Attentes des professionnels de la prévention à l’égard de la révision

En raison du calendrier, il est trop tôt pour connaître les positions officielles sur la loi des experts du domaine des addictions. Les échanges qui ont eu lieu en marge de la préparation du colloque international sur la prévention du jeu excessif qui s’est tenu à Neuchâtel en janvier 2014 ainsi que différentes prises de position publiées dans la presse régionale permettent néanmoins de s’en faire une idée suffisamment précise (Caflisch & al., 2014).

Un consensus s’est dégagé sur la nécessité de prévoir des normes suffisamment précises dans les domaines suivants : l’information des joueurs sur le risque d’addiction et les lieux d’aide ; la formation du personnel en contact avec les joueurs ; la détection précoce sur les lieux de jeux ; les mesures de modération dans le contenu des jeux, dans leur mise sur le marché et dans la publicité ; les mesures de limitation et d’exclusion (auto- et hétéro-) ainsi que la collecte de données anonymisées relatives au comportement des joueurs.

En ce qui concerne le potentiel de risque, il est apparu essentiel que le régulateur ait les prérogatives de fixer les seuils de prévention attendus pour chaque offre de jeux en s’aidant d’instruments d’évaluation (à l’exemple des travaux rapportés par Häfeli, 2010).

En matière de limitation et d’exclusion, il semble se dégager un accord sur l’opportunité de lier de telles mesures à des consultations de prévention individuelles même si la responsabilité des décisions d’exclusion et de limitation incombait aux opérateurs. Compte tenu du potentiel de risque des nouvelles offres de jeux électroniques, aux yeux des experts, le nouveau dispositif législatif devrait intégrer des possibilités d’exclusion pour les offres exploitées dans d’autres canaux de diffusion que les casinos (cafés-restaurants, Internet).

S’agissant de la taxe destinée à financer les mesures de prévention externes aux opérateurs, les besoins ont été estimés à un peu plus de 1 % du revenu brut de l’ensemble des jeux (Groupement romand d’étude des addictions, 2014), soit environ quatre fois le montant alloué aujourd’hui qui se chiffre à 4,8 millions de francs annuellement (Von Stockar, Zandonella, Schwab Cammarano, 2013). Les mesures demandées comprennent le renforcement de celles qui existent déjà dans le domaine du traitement/conseil et de la formation continue professionnelle et interprofessionnelle. De plus, de nouvelles mesures sont demandées dans des domaines qui, à ce jour, ne sont financés que de manière marginale ou indirecte. Il s’agit de la prévention universelle (campagnes multi-supports intégrant les nouvelles technologies), de la promotion de la santé (articulation avec les programmes préexistants), de la prévention sélective (travail avec les groupes à risque), de la protection de la jeunesse (notamment intégration dans les programmes scolaires), de l’approche communautaire (interventions mobiles), de la santé au travail, de la prévention auprès des joueurs jouant à des offres illégales et, enfin, de la recherche.

Compatibilité du dispositif suisse avec l’approche de RDR

Par ses mécanismes de détection précoce et de prévention tertiaire, le dispositif suisse développé depuis 10 ans comporte plusieurs éléments congruents à l’approche de RDR. En matière de mesures à la charge des opérateurs, on note le contrôle à l’entrée des casinos, la formation du personnel, l’exclusion, la présence de dispositifs de détection précoce et leur articulation avec les dispositifs d’aide spécialisés, l’homologation des jeux de loterie intégrant l’évaluation du potentiel de risque ainsi que des mesures de prévention du tabagisme passif. En matière de dispositifs d’aide spécialisés, entrent également dans ce cadre la contribution causale avec une obligation pour l’État de réalisation ainsi qu’une offre diversifiée ne visant pas nécessairement l’abstinence. Enfin, à l’interface des cadres législatifs et réglementaires, on relève la volonté de mettre en place un régime d’octroi de licence pour des domaines du marché qui étaient confinés jusqu’alors dans l’illégalité (marché des casinos en ligne, tournois de poker hors des casinos). Il persiste néanmoins des tensions importantes entre ce que serait un dispositif de RDR pleinement en phase avec la définition de référence de l’IHRA et le dispositif actuel, où la RDR entre en compétition avec l’approche historique de RSE du jeu excessif.

Compatibilité en ce qui concerne les objectifs poursuivis

Le premier point à reconsidérer concerne les buts d’une approche de RDR versus ceux d’une approche de RSE. Dans l’approche de RSE, sont visées la préservation des recettes de l’état par la lutte contre les marchés illégaux, la préservation du bien-être des joueurs récréatifs et la préservation de la liberté économique par une limitation de l’emprise de l’État sur le marché selon les principes de stricte nécessité et de proportionnalité. La diminution de l’incidence des conséquences négatives du jeu excessif demeure un but secondaire. Dans l’approche de RDR, ces buts deviennent primaires. Si un but primaire de « prise en compte des dangers inhérents au jeu » avait bien été posé dans les documents gouvernementaux liés au nouvel article constitutionnel (Grisel, 2014), on peut se questionner sur les choix finaux qui seront faits, où le caractère primaire de cet objectif pourrait se noyer dans une liste d’objectifs divers, tous ramenés au même plan. D’autre part, cet objectif doit être précisé. Dans la littérature actuelle, les indicateurs liés aux « dangers inhérents des jeux d’argent » sont limités : incidence/prévalence du jeu excessif dans différents segments de population, données liées à la criminalité. Il y a lieu de développer la recherche relative à de nouveaux indicateurs comme les conséquences financières, les conséquences pour les proches et le calcul du burden of disease et des coûts sociaux.

Compatibilité en ce qui concerne les mesures incombant aux opérateurs

En matière de mesures mises en œuvre sur les lieux de jeu, l’actuelle approche de RSE repose tantôt sur des efforts volontaires, tantôt sur des demandes de l’autorité de régulation. De telles mesures devraient être scientifiquement fondées par des travaux réalisés sur mandat institutionnel d’une autorité de santé publique, ce qui n’a jamais été le cas jusqu’à présent.

En matière de recherche relative à l’efficacité, nous l’avons relevé précédemment, les domaines de la formation, de la détection précoce et de l’exclusion sont pauvrement évalués, alors que ceux de la publicité, de l’information du joueur et du paramétrage des jeux ne le sont, pour ainsi dire, pas du tout.

Une approche de RDR nécessiterait une autorité d’homologation des jeux d’argent concernant une autorité de santé publique disposant de moyens appropriés pour soutenir la recherche ad hoc, et l’indépendance de cette autorité devrait être garantie.

D’autre part, la primauté accordée par la RSE à l’exclusion des joueurs problématiques minimise le fait qu’une mesure d’exclusion mal préparée et non accompagnée sur le plan psychosocial débouche très souvent sur de nouvelles difficultés liées à d’autres offres de jeux, le cas échéant transfrontalières ou illégales (Hayer & Meyer, 2011b).

Compatibilité en ce qui concerne les dispositifs d’aide et de prévention

En matière de prévention externe aux lieux de jeu, incluant prévention secondaire, tertiaire, et les traitements spécialisés, des progrès importants ont été réalisés dans la diversification de l’offre. Cependant, du point de vue des évidences scientifiques, ce sont avant tout les traitements visant l’abstinence qui ont été évalués (Simon & al., 2012). Les programmes de prévention éducationnelle n’ont pas ou peu été évalués, de même que les offres visant les proches, les publics spécifiques, l’articulation traitement-lieux de jeu, la consommation contrôlée.

Une approche de RDR devrait prévoir un mécanisme de financement des dispositifs d’aide et de prévention incluant des programmes de santé publique aux différents niveaux de l’État (en Suisse, cantons et Confédération). On comprend aisément l’utilité à court terme d’une contribution causale assise sur le revenu des jeux (« taxes de prévention ») dans un contexte de maladie nouvellement reconnue et de budgets de la santé très tendus. Toutefois, le jeu excessif ayant le statut de maladie chronique reconnue comme addiction dans la dernière nomenclature DSM, le financement des dispositifs d’aide et de prévention entre dans les obligations ordinaires de l’État en matière de droit à la santé. Une approche de RDR aboutie implique des services disponibles, accessibles, user–friendly et de qualité au sens de l’observation générale 14 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels.

Compatibilité en ce qui concerne l’articulation des différentes lois et réglementations

La prise en compte du droit à la santé concerne également l’interface de la triade épidémiologique entre agent et environnement, qui implique la complémentarité entre les lois relatives au marché des jeux d’argent et les lois de santé publique et autres dispositions législatives ou réglementaires visant à asseoir le droit à la santé.

Dans une approche de RDR, comme l’a montré la politique drogue dite des quatre piliers, cette cohérence entre les différentes lois est un élément déterminant. Dans l’approche de RSE, cette cohérence est ignorée, car la prévention du jeu excessif s’inscrit dans des cadres de régulations liés exclusivement aux secteurs économique et judiciaire. À ce jour, dans les demandes du Comité des droits économiques, sociaux, et culturels adressées aux pays pour les prier d’établir leur rapport d’activité envers le pacte du même nom (article 12), le jeu excessif ne figure pas. Cela s’explique certainement par le caractère récent de la reconnaissance du jeu excessif comme maladie, mais cela augure également du chemin qui reste à parcourir sur le plan institutionnel. Dans le rapport suisse sur le droit à la santé, les efforts en matière d’alcool, de tabac et de drogues sont parfaitement documentés. Le seront-ils un jour en matière de jeu excessif ? Si oui, quand ?

Conclusions

L’ouverture progressive de la RDR à toutes les conduites addictives remet en question la place de la santé publique au sein des politiques publiques « jeux d’argent ». S’il y a un consensus de plus en plus large pour considérer l’addiction aux jeux d’argent comme une maladie et, par là, comme engageant l’État au titre du droit à la santé, le développement d’une approche de RDR du jeu excessif se heurte à deux limitations. D’une part, les objectifs des mesures de prévention ne sont, la plupart du temps, pas clairement définis ni évalués. En matière de jeu excessif, les indicateurs comme le burden of disease ou les coûts sociaux demeurent méconnus. D’autre part, il existe un conflit structurel entre la perception de santé publique et celle des opérateurs de jeu et des services économiques de l’État. Pour la santé publique, la liberté économique des opérateurs a vocation, par définition, à être restreinte par l’intervention de l’État, car les opérateurs sont là pour permettre un jeu à moindre risque, que ce soit par des monopoles d’État ou par le biais de régimes d’octrois de licences. Pour les opérateurs et les acteurs économiques de l’État, une telle vision est une atteinte à la liberté d’entreprendre et de commercer des produits et des services afin de réaliser des profits. Le jeu excessif est alors perçu comme n’affectant qu’une proportion marginale de clients et il y a lieu de respecter la liberté individuelle de s’adonner à des conduites à risque.

Afin d’intégrer la prévention du jeu excessif au sein d’une coordination politique, il apparaît indispensable de donner une meilleure visibilité en matière d’indicateurs, de financements et de responsabilités. S’agissant de populations qui consultent peu dans les lieux d’aide traditionnels, il importe de développer des offres dites « à seuil bas », intégrant des consultations sur les lieux de jeux. Des bases légales solides doivent encadrer l’interface entre les lieux d’aide spécialisés et les lieux de jeux afin de préserver tant les opérateurs que les intervenants sociosanitaires de jeux d’influences mutuelles problématiques.

L’expérience suisse a montré la faisabilité de développer, par la législation, des mesures de détection précoce couplées à des mécanismes d’auto- et d’hétéro-exclusion sous la responsabilité des opérateurs. Comme dans d’autres juridictions, une taxe sur le revenu des jeux, spécifiquement dédiée à la prévention, a permis de faire émerger un réseau de spécialistes du jeu excessif, avec un discours résolument indépendant de celui des acteurs économiques de l’État. Ce faisant, l’expérience suisse a également montré les limites d’un dispositif où l’autorité des services de santé de l’État est inexistante.

En projetant d’inscrire la protection contre l’addiction au jeu comme un objectif premier, le gouvernement suisse a ouvert une boîte de pandore. L’objectif de maximisation des recettes fiscales s’effacera-t-il devant la recherche d’un optimum de réduction des coûts sociaux ? Une approche de RDR du jeu excessif rend ce changement de paradigme inéluctable.

Remerciements

Les auteurs remercient Mme Béatrice Godoy, Mme Ingrid Vogel, Mme Coralie Zumwald, Mme Cheryl Dickson du Centre du Jeu excessif pour leur aimable relecture. Remerciements également à l’ensemble des partenaires institutionnels du colloque « Jeu excessif : traiter, prévenir, réduire les risques », qui s’est tenu à Neuchâtel du 15 au 17 janvier 2014, pour leurs contributions diverses aux réflexions qui ont été rapportées.

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Notes

[1] ^Les précisions au sujet des services d’assistance téléphonique se trouvent sur les sites suivant : www.sos-jeu.ch (région linguistique francophone), www.sos-spielsucht.ch (région germanophone) et www.giocoresponsabile.com (région italophone).

[2] ^Il n’a pas été possible, à ce jour, de commencer une étude pilote qui permettrait d’obtenir des données empiriques à l’appui de cette proposition. C’est un des cas particuliers qui retiendra toute l’attention dans les négociations relatives à la future loi, selon que cette dernière donnera ou non une base légale suffisante pour imposer ce type d’étude, en marge des procédures d’homologation des nouveaux jeux.

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