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MAUDE BONENFANT, ALEXANDRA DUMONT /

Maude Bonenfant, Ph. D, Professeure titulaire, Département de communication sociale et  publique, Université du Québec à Montréal et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les données massives et les communautés de joueurs

Alexandra Dumont, Doctorante en communication, Université du Québec à Montréal

Correspondance
Maude Bonenfant
Département de communication sociale et publique (UQAM)
C.P. 8888, succursale Centre-ville
Montréal, Qc
H3C 3P8
Téléphone : 514 987-3000, poste 3392
Courriel : bonenfant.maude@uqam.ca


Résumé

Si de nombreux jeux vidéo sont vendus moyennant un certain montant, le modèle d’affaire des jeux gratuits (free-to-play) s’est rapidement imposé au cours de la dernière décennie. Or ce modèle, qui est basé sur la collecte de données personnelles, les microtransactions et le profilage publicitaire, implique des ventes d’items et un temps de connexion le plus étendu possible afin d’accroître les profits. Pour ce faire, différentes stratégies sont utilisées, dont des stratégies dites « persuasives » qui influencent les joueurs et joueuses à demeurer connectés, à dépenser et à revenir fréquemment sur le jeu gratuit. Parmi ces stratégies, les mécaniques de jeux de hasard et d’argent (JHA) sont reconnues pour leur force persuasive et leur pouvoir addictif. Elles sont pourtant de plus en plus présentes au sein des jeux mobiles pour les adultes, mais également ceux pour les enfants. Afin de documenter le phénomène, 249 jeux mobiles gratuits pour enfants ont été analysés pour évaluer la prévalence des mécaniques persuasives et de JHA, leurs formes d’actualisation et leurs types d’intégration dans l’expérience vidéoludique des enfants. Nos résultats démontrent une « gamblification » des jeux mobiles gratuits pour enfants et un conditionnement des comportements qui passe par une normalisation des mécaniques persuasives et de JHA auprès de ce jeune public. La convergence des jeux vidéo avec les JHA se confirme à nouveau avec une focalisation sur des jeux pour un très jeune public. L’article se conclut en prenant acte de ce sérieux enjeu de santé publique en lien avec le bien-être des enfants.

Mots-clés : jeux mobiles gratuits, jeux vidéo, mécaniques persuasives, « gamblification », enfants, addiction

Gambling in free-to-play games for children

Abstract

The free-to-play business model became increasingly popular over the past decade. Based on the collection of personal data, microtransactions and advertising profiling, this model requires the sale of in-game items and players’ prolonged connection times to generate profits. Various strategies are used to ensure its financial success, including so-called “persuasive” strategies that influence players to stay connected, spend money, and return frequently to the game. Among these strategies, gambling mechanics are renowned for their persuasiveness and addictive power. Nevertheless, they are increasingly present in mobile games for adults, as well as those for children. To document this phenomenon, 249 free mobile games for children were analyzed to assess the prevalence of persuasive and gambling mechanics, actualization, and types of integration into children’s gaming experiences. Our findings demonstrate a gamblification of free mobile games for children by conditioning behaviours through the normalization of persuasive and gambling mechanics with this young audience. The convergence of video games with gambling is confirmed once again, focusing on games for a very young audience. The article concludes by acknowledging this serious public health issue concerning children’s well-being.

Keywords: Free-to-play, mobile games, video games, persuasives mechanics, gamblification, children, addiction

Las mecánicas de los juegos de azar y de dinero en los juegos móviles para los niños: de un modelo económico al condicionamiento a la adicción

Resumen

Si bien numerosos juegos video se venden con el desembolso de un cierto monto de dinero, el modelo de negocios de los juegos gratuitos (free-to-play) se ha impuesto rápidamente durante el último decenio. Este modelo, que se basa en la recolección de datos personales, las micro transacciones y el perfilado publicitario implica la necesidad de vender artículos y obtener un tiempo de conexión lo más extendido posible para aumentar los beneficios. Para lograrlo se utilizan diferentes estrategias, entre ellas las estrategias llamadas “persuasivas”, que influyen en los jugadores y jugadoras para que permanezcan conectados, para que gasten y vuelvan lo más frecuentemente posible al juego gratuito. Entre estas estrategias, los mecanismos de juegos de azar y de dinero son notables por su fuerza persuasiva y su poder adictivo. Sin embargo, aparecen con cada vez más frecuencia en los juegos móviles para adultos e igualmente para los de los niños. Con el fin de documentar el fenómeno, se analizaron 249 juegos móviles gratuitos para niños con el objetivo de evaluar la prevalencia videolúdica de las mecánicas persuasivas y de JHA, sus formas de actualización y sus tipos de integración en la experiencia videolúdica de los niños. Nuestros resultados demuestran la introducción del azar (gamblification) en los juegos móviles gratuitos para niños y un condicionamiento de los comportamientos que pasa por la normalización de las mecánicas persuasivas y de JHA con este público joven. La convergencia de los juegos video con los JHA se confirma de nuevo con una focalización sobre juegos para un público muy joven. El artículo concluye con la constatación de este serio problema de salud pública en relación con el bienestar de los niños.

Palabras clave: juegos móviles gratuitos, mecánicas persuasivas, introducción del azar, niños  


L’usage des jeux mobiles gratuits chez les enfants

Les jeux vidéo pour enfants connaissent une popularité exponentielle, particulièrement à la suite de la pandémie (Cowan et al., 2021). Les résultats d’un sondage, mené par l’Entertainment Software Association of Canada (ESAC) entre le 18 et 27 mai 2020, montrent que 44,0 % des joueurs et des joueuses qui sont parents d’au moins un enfant âgé entre 6 et 17 ans jouaient davantage avec leurs enfants depuis le début de la pandémie. Les enfants et les adolescents (6 à 17 ans) jouent en moyenne 13 heures par semaine et, pour les plus petits (6 à 12 ans), 49,0 % des filles et 31,0 % des garçons jouent sur des plateformes mobiles (ESAC, 2020, p. 14-18).

L’utilisation des plateformes mobiles par les enfants est en effet croissante depuis les confinements liés à la pandémie, leur usage ayant été favorisé tant dans le domaine personnel que scolaire (Pew Research Center, 2020). Un rapport publié par le Pew Research Center en 2020 souligne que 49,0 % des enfants âgés de 0 à 2 ans interagissent avec un téléphone intelligent, 62,0 % des enfants de 3-4 ans et 59,0 % des enfants de 5 à 8 ans (2020). De son côté, Common Sense Media indique que, toujours en 2020, près de la moitié (46,0 %) des enfants âgés de 2 à 4 ans et 67,0 % des 5 à 8 ans possèdent leurs propres appareils mobiles (téléphones intelligents et/ou tablettes) (Rideout et Robb, 2020). L’usage de plus en plus commun des plateformes mobiles, combiné à une croissance des pratiques vidéoludiques, mène à conclure que la pratique du jeu mobile chez les enfants tend à se généraliser.

Dans le domaine du jeu mobile, le modèle d’affaire des jeux gratuits (free-to-play) est prédominant (Fitton et Read, 2019 ; Alha et al., 2016) et entraîne un certain nombre de conséquences pour les joueurs et joueuses, dont des risques de perte de contrôle et d’excès de pratique (Savard et al., 2018). En effet, ce modèle implique un temps de connexion le plus étendu possible afin d’accroître les profits (Nieborg, 2016a). Pour ce faire, différentes stratégies sont utilisées, dont des stratégies dites « persuasives » qui influencent les joueurs et joueuses à demeurer connectés, à consommer des microtransactions et à revenir fréquemment sur le jeu mobile. Parmi ces stratégies, les mécaniques de jeux de hasard et d’argent (JHA) sont reconnues pour leur force persuasive et leur pouvoir addictif (Harrigan et al., 2010 ; Zagal et al., 2013 ; Drummond et Sauer, 2018 ; Zendle et Cairns, 2019 ; Legner et al., 2019). Ainsi, leurs usages croissants, tant dans le design des jeux vidéo mobiles que dans l’ensemble de l’industrie vidéoludique, donnent naissance à une « gamblification » des jeux vidéo, c’est-à-dire à une utilisation de plus en plus importante des mécaniques de JHA dans des jeux ne se présentant pas comme tels, et ce, afin de conserver l’attention et l’intérêt des joueurs et joueuses (Macey et Hamari, 2022).

Malgré l’importance du phénomène, peu d’études ont été menées spécifiquement sur les jeux mobiles gratuits dédiés aux enfants et qui présentent des mécaniques persuasives et de JHA (Kidron et al., 2018 ; Melzer et al., 2021 ; van der Hof et al., 2022 ; Radesky et al., 2022 ; James et al., 2022 ; Sousa et Oliveira, 2023 ; Fitton et Read, 2023). L’objectif de cet article est donc d’évaluer si ce genre de mécaniques est présent dans les jeux mobiles gratuits pour enfants grâce à une analyse qualitative d’un large corpus. Plus précisément, nous évaluerons la prévalence des mécaniques persuasives et de JHA, leurs formes d’actualisation et leurs types d’intégration dans l’expérience vidéoludique des enfants. Ce faisant, il sera possible d’inférer de manière prospective les effets des mécaniques persuasives et de JHA sur les jeunes joueurs et joueuses.

Afin de bien expliquer le contexte au sein duquel s’inscrit ce genre de mécaniques, le modèle économique propre aux jeux mobiles gratuits sera d’abord présenté. Les explications sur les modes de rentabilité de ces jeux permettront de mettre en lumière les raisons qui sous-tendent la présence des mécaniques persuasives et de JHA dans des jeux visant un jeune public. Dans un deuxième temps le cadre d’analyse ainsi que la méthode de collecte de données sur les jeux mobiles qui constituent le corpus de recherche seront détaillés, en précisant quelques caractéristiques des jeux analysés. Dans un troisième temps, un ensemble de résultats seront présentés et brièvement analysés en insistant sur la convergence des jeux vidéo avec les JHA. Finalement, ces résultats seront discutés à la lumière d’un certain nombre d’enjeux et d’autres recherches dans le domaine qui font état des problèmes que ce genre de mécaniques posent pour un public mineur.

Infrastructure techno-économique des jeux mobiles gratuits et convergence avec les JHA

Les activités de hasard et d’argent sont présentes à travers le temps et diverses sociétés, adaptant leurs significations et utilités selon les préoccupations sociales et culturelles de chaque époque (Macey et Hamari, 2022). Suivant la montée des valeurs consuméristes en Occident, les JHA ont adopté les principes fondamentaux du capitalisme (Smith et Abt, 1984 ; Schüll, 2012). « Our current framing of gambling is one of risk and reward, where wealth is accumulated by the victor » (Wardle, 2021, p. 22). Dans le contexte d’une marchandisation des loisirs (Hemingway, 1996), les JHA sont de plus en plus acceptés socialement, devenant un « passe-temps » légitime, et se positionnant comme industrie de masse (Reith, 2019).

Cette manière de concevoir les JHA n’est pas étrangère au développement des jeux vidéo qui ont vu au cours des années 2000 une expansion massive, faisant de ce média l’industrie culturelle la plus lucrative à ce jour. Au tournant du siècle, les deux industries du jeu (gaming / gambling) sont distinctes, mais la convergence économique, favorisée par la légitimation de chacune de ces activités, mènera à une intégration progressive du gaming vers le gambling (par exemple avec les casinos sociaux (Macey et Kinnunen, 2020) puis du gambling vers le gaming par l’intégration de mécaniques de JHA au sein des jeux vidéo (Griffiths, 2008 ; Gainsbury et al., 2015 ; Wardle, 2019 ; Kolandai-Matchett et Wenden Abbott, 2022).

Sur le plan idéologique, de nouvelles avenues « d’expansion » du capitalisme visent l’intensification de la consommation, plutôt que de rechercher de nouveaux produits (Hardt et Negri, 2000). « As a consequence, commercial gambling has today become a site of intensified consumption » (Reith, 2013, p. 718), tout comme le sont devenus les jeux vidéo, entre autres via l’adoption du modèle d’affaire des jeux gratuits. Une consommation intense sur de plus petites périodes (Schor, 2008) d’éléments immatériels dans des environnements « virtuels » (Ritzer, 1993) est visée par ces jeux. Il n’est plus question de combler des désirs ou besoins, mais de favoriser un engagement continu dans le temps grâce à une consommation d’« expériences intensives » plutôt que de produits.

The expansion of a global gambling industry can be seen as an exemplary instance of this shift. It is a business that does not produce tangible goods but rather markets intensified experiences, creating profits from the pure circulation and extraction of money from players. (Reith, 2019, p. 215).

Cette dématérialisation, intensification et accélération de la consommation dans les JHA, mais également dans les jeux vidéo sont rendues possibles grâce à la technologie. Les développements technologiques et réseautiques permettent en effet aux industries des jeux vidéo et des JHA de créer des espaces numériques de jeux pouvant faire abstraction de la notion de temps et de lieu (Reith, 2013). Ces technologies offrent aux usagers et aux usagères un accès constant, rapide et instantané aux jeux, ce qui augmente d’ailleurs les risques d’addiction (Deans et al., 2016). La convergence des JHA avec les jeux vidéo est particulièrement visible par le partage de toute une infrastructure techno-économique de plus en plus invasive et des médias de plus en plus immersifs (Griffiths et al., 2013).

Dans l’industrie vidéoludique, les jeux mobiles ont rapidement gagné en popularité à la suite de l’apparition des téléphones intelligents et des magasins d’applications, surtout à partir de 2008 (Nieborg, 2016b). Parallèlement à ces nouveaux supports mobiles, les moyens de développement de jeux vidéo deviennent plus accessibles pour les entreprises conceptrices (Whitson, 2019). Les technologies et les logiciels de développement sont désormais faciles d’accès et moins coûteux et les procédures de publication sont moins opaques que d’autres modes de distribution. Une des conséquences de cet élargissement de la production de jeux vidéo aux plateformes mobiles est la compétition croissante entre les développeurs puisque l’offre devient plus abondante. La difficulté de se démarquer augmente et les développeurs disposent d’un temps très court pour convaincre leur public d’acheter leur jeu.

Pour remédier à ces défis, plusieurs développeurs offrent leurs jeux entièrement gratuits (free-to-play) ou partiellement gratuits (freemium). Les jeux gratuits se définissent par leur accessibilité sans coût, mais peuvent inclure divers types de microtransactions volontaires (Alha, 2020). En fait, pour être rentables, les entreprises propriétaires des jeux exploitent principalement trois sources de monétisations : la vente en jeu (microtransactions), la vente d’espaces publicitaires directement intégrés dans l’interface du jeu et la vente de données personnelles à la suite d’une collecte liée à l’utilisation de l’application de jeu (Fields et Cotton, 2011 ; Nieborg, 2016a ; Whitson, 2019 ; Bycer, 2022). Les microtransactions concernent l’achat de contenu supplémentaire, d’actions ou d’objets en jeu qui changent la jouabilité (ex. : faciliter certaines actions ou rendre le personnage plus puissant) ou qui sont seulement esthétiques (ex. : ajouter un vêtement à un personnage ou un accessoire à un véhicule). Ces actions et items sont durables ou éphémères et se vendent à des prix très variables, généralement à partir d’un dollar jusqu’à quelques centaines de dollars.

Afin d’assurer le succès économique des jeux mobiles gratuits, les développeurs accumulent également des informations sur leur clientèle, principalement à partir des actions menées en jeu et des comportements d’achat (Whitson et French, 2021). Les données collectées servent alors à établir des profils utilisés pour présenter des offres ciblées, par exemple en proposant pour un temps limité des items en jeu à des prix réduits lorsqu’une déconnexion imminente est prédite ou lors d’une séquence particulièrement difficile à surmonter (van Rooij et al., 2021). Ce profilage sert aussi à reproduire des comportements d’achats passés et, donc, à accroître les microtransactions et les temps de connexion des joueurs et joueuses.

The systems are designed to optimize the nature and scheduling of purchasing offers to increase the probability that the offer will be desirable to the player. In some patented systems, this may be achieved by accounting for certain metrics that affect the likelihood of purchasing behavior, such as product features (e.g., price, function, or contextual value) in combination with data on player characteristics (e.g., purchasing tendencies, available funds, item preferences, inventory). (King et al., 2019, p. 139)

Plus les développeurs accumulent des données sur les personnes joueuses, plus leur système d’apprentissage machine prédit de manière performante les comportements et mieux la programmation adapte le jeu et les offres à tout un chacun – avec tous les risques de manipulation possibles en termes de dépenses monétaires et d’excès d’utilisation des jeux (Whitson et French, 2021). Ces risques sont aussi démultipliés dans un contexte où le développeur du jeu use d’interfaces truquées (dark patterns) pour influencer les actions de la personne contre son intérêt (Zagal et al., 2013).

Outre l’usage des données personnelles à des fins prédictives, les studios de développement génèrent également des revenus grâce à la diffusion de publicités sur les interfaces de jeu. Ces espaces vendus aux annonceurs peuvent être présents sous forme de bannières, de vidéos intercalées entre de courtes séances de jeu ou même de vidéos implémentées dans les mécaniques de jeu : un exemple très fréquent est celui d’offrir des récompenses en jeu (donc qui ne coûte rien aux développeurs) en échange du visionnement de vidéos publicitaires. Cette structure publicitaire sert ainsi à vendre aux annonceurs du temps d’attention des joueurs et des joueuses ciblés en les captant au sein du jeu (Nieborg, 2017 ; Myrstad et Tjøstheim, 2021). Ce marché extrêmement profitable de la donnée et de la publicité qui soutient l’industrie du jeu mobile gratuit (Mäntymäki et al., 2020) fonctionne selon un temps de connexion le plus long possible : plus la connexion au jeu est grande, plus de données sont collectées, ce qui permet un profilage plus précis, mais également plus le temps d’attention est long, plus les envois de publicités et d’incitatifs à des microtransactions sont nombreux.

Afin de maintenir captifs les joueurs et les joueuses, les développeurs adaptent leur design pour encourager la poursuite du jeu, inciter au retour au jeu, créer des habitudes quotidiennes de pratique, stimuler les microtransactions, etc. Ce type de design, qualifié de persuasif, vise à « convaincre » les joueurs et les joueuses d’adapter leurs comportements en fonction des objectifs des entreprises. Il s’inscrit plus largement dans les technologies persuasives, définies comme « any interactive computing system designed to change people’s attitudes or behaviors » (Fogg, 2002, p. 1). Les principes du design persuasif reposent de manière générale sur la psychologie comportementale et les biais cognitifs (Legner et al., 2019). Ils visent à inciter le changement de certains comportements par « soi-même », sans coercition et par apprentissage. La part ludique, mais également procédurale du jeu, semble s’accorder parfaitement avec les grands principes de ce conditionnement béhavioral puisqu’on y joue de manière volontaire en recevant fréquemment des récompenses afin d’encourager ou de réprimer certaines actions. Que ce soit des jeux vidéo ou des JHA, les mêmes stratégies de conception sont utilisées puisque ces jeux partagent des objectifs communs, soit garder les joueurs et les joueuses connectés le plus longtemps possible et les faire dépenser.

Les mécaniques persuasives des jeux vidéo incluent aussi les mécaniques des JHA. Si elles peuvent être considérées de manière stricte selon la définition légale des JHA, elles se déclinent aujourd’hui sous diverses formes dans les jeux vidéo gratuits, entre autres avec des monnaies en jeu, des mises symboliques (par exemple sous forme de visionnement de publicités), des représentations graphiques avec des gradations de cadeaux aléatoirement offerts (par exemple sous forme de roue de fortune), etc. Il existe un continuum de «gamblification » des jeux vidéo entendu comme « a process that utilises the affordances of gambling as a means of promoting consumer uptake […] Gamblification, therefore, draws upon a wealth of cultural practices and values to promote gambling as an activity » (Macey et Hamari, 2022, p. 7). La convergence des JHA avec les jeux vidéo est particulièrement prégnante dans les jeux gratuits, car l’attrait suscité par l’incertitude du gain est très grand. Les conventions et les formes des JHA y sont recontextualisées pour assurer la rentabilité des entreprises de jeux vidéo gratuits, favorisant ainsi la diffusion des JHA : « gambling is more ubiquitous, more pervasive and its imagery more widespread than ever before » (Reith, 2019, p. 214-215).

Les mêmes biais cognitifs des JHA sont exploités dans les mécaniques des jeux gratuits : aversion à la perte ou à la dépossession, quasi victoire (near miss), renforcement à intervalles fixes ou variables, illusion ou erreur du parieur (gambler’s fallacies), etc. (King et al., 2010 ; Johnson et Brock, 2020). Ce design persuasif qui incite au prolongement du temps de connexion et à des dépenses monétaires est employé non seulement dans les jeux mobiles gratuits pour adultes, mais également dans ceux qui s’adressent aux enfants. Afin d’établir un portrait plus précis des types de mécaniques persuasives et de JHA présentes dans les jeux mobiles gratuits pour enfants, une analyse qualitative d’un corpus a été réalisée en partant des plateformes de jeu elles-mêmes.

Méthodologie : enquête sur les jeux mobiles gratuits pour enfants

La méthodologie utilisée s’inscrit dans un paradigme socioconstructiviste et une approche communicationnelle où le sens du jeu est coconstruit par l’interaction entre le jeu (conçu par les développeurs) et la personne joueuse (Bonenfant et al., 2020). Plus précisément, les jeux sont considérés à partir de ce qui est communiqué par leurs affordances grâce à une analyse des signes, des représentations, des fonctionnalités et des mécaniques afin d’inférer la jouabilité, soit le sens produit par l’agentivité des joueurs et des joueuses lors de l’expérience ludique (Farrar et al., 2013 ; Elson et al., 2014). En ce sens, l’étude n’en est pas une de réception, mais plutôt une étude sémiotique (Compagno et Coppock, 2009 ; Pérez-Latorre et al. , 2017) grâce à l’interprétation des effets de sens des jeux ainsi que de leurs effets affectifs (Boutaud et al., 2004). De nombreux travaux en études du jeu (game studies) ont été convoqués pour structurer le cadre méthodologique (Mäyrä, 2008 ; Fernández-Vara, 2015), entre autres grâce aux genres de jeux (Arsenault, 2011), aux types de microtransaction, aux structures des jeux, et ce, en lien avec le modèle économique du free-to-play (Salen et Zimmerman, 2005 ; El-Nasr et al., 2016 ; Evans, 2016 ; Nieborg, 2016b ; Alha, 2020 ; Neely, 2021 ; Petrovskaya et Zendle, 2021).

Pour étudier la prévalence des mécaniques persuasives et de JHA, leurs formes d’actualisation ainsi que leurs types d’intégration dans les jeux mobiles gratuits destinés aux enfants, un corpus représentatif de 249 jeux à la fois présents sur l’App Store (iOS) et le Google Play Store (Android) a été constitué à partir des sections : « Approved by teachers, kids et family » apparaissant dans l’onglet « Jeux » de chacune des plateformes. En plus des catégorisations prédéfinies par les magasins d’applications, cinq critères ont été adoptés pour définir une sélection diversifiée et représentative des jeux. D’abord, (1) les jeux ont été choisis à partir des classements par âge établis par les magasins d’applications. En ce sens, seuls les jeux portant une cote ESRB « Enfants et Adultes », « Enfants et Adultes 10+ » ou « Adolescents » ont été retenus sur le Play Store, tandis que sur l’App Store, seuls les jeux classés comme « 4+ », « 9+ » ou « 12+ » ont été sélectionnés. Puis, (2) ont été priorisés des jeux « approuvés par les enseignants » de la plateforme Google, car l’étiquette vise à rassurer les parents sur la qualité des jeux. Ensuite, (3) la popularité des jeux a été prise en compte, en sélectionnant les jeux associés au plus grand nombre de téléchargements ou d’avis. Ce critère vise à tenir compte des intérêts et des pratiques vidéoludiques actuelles des enfants en se basant sur les titres suscitant le plus d’engagement auprès d’un jeune public. (4) Une sélection « organique » de certains jeux a aussi été réalisée selon les recommandations du magasin d’applications afin de simuler la navigation et les intérêts des enfants. Bien que ce critère ne soit pas reproductible compte tenu des variables inconnues liées aux algorithmes de recommandation, cette démarche offre un aperçu des contenus spécifiquement recommandés aux enfants par les magasins d’applications au regard des thématiques, des détails de contenu, de la jouabilité et du groupe d’âge visé. Finalement, (5) un visuel appelant un jeune public a guidé le choix de certains jeux, car il stimule l’intérêt des enfants : « The use of cartoon-like graphics, bright colors, simplistic gameplay and/or language could be an indication that a game is likely to appeal to children » (van der Hof et al., 2022, p. 4). Grâce à ces cinq critères, nous avons pu simuler la navigation d’un enfant et les recommandations faites par les magasins d’applications afin d’influencer ses choix de jeux.

Les 249 jeux colligés ont été téléchargés et observés entre le 11 avril et le 18 septembre 2022. Pour mener à bien cette étude, un ensemble de huit appareils mobiles a été utilisé, soit quatre téléphones intelligents de type Android ainsi que quatre iPhones. Chacun de ces appareils a préalablement été réinitialisé aux paramètres d’usine et de nouveaux comptes utilisateurs ont été créés. Cette démarche permet de limiter l’influence ou les biais potentiels provenant des préférences des utilisateurs et des utilisatrices antérieurs, des jeux précédemment installés ou de l’historique de navigation. Alternativement, l’usage exclusif de ces appareils pour les fins de la recherche participe à créer des préférences axées sur le contenu vidéoludique destiné aux moins de 13 ans.

Les différents jeux retenus ont été examinés par l’intermédiaire d’une grille d’observation couvrant différentes thématiques et enjeux relatifs aux jeux mobiles gratuits. Composée de dix grandes catégories, cette grille couvre divers aspects dont les informations d’identifications, la classification attribuée par les organismes d’évaluation de contenu, le recensement des publicités observées, la documentation des microtransactions implémentées, le détail des mécaniques persuasives incluses, ainsi que les pratiques adoptées par les studios de développement en matière de sécurité des données personnelles. Empruntant une démarche itérative, nous nous sommes d’abord appuyés sur les travaux précédemment réalisés par Fogg (2002), Zagal et al. (2013), Legner et al. (2019) ainsi que Fields (2014) afin de recenser les mécaniques persuasives implémentées dans les jeux mobiles gratuits. Les effets persuasifs et les biais cognitifs exploités par les mécaniques sélectionnées ont par la suite été détaillés et organisés selon leurs visées. Cette première sélection a par la suite été révisée et ajustée en fonction des observations réalisées lors de sa mise en application auprès d’un certain nombre de jeux mobiles gratuits.

Trois assistants de recherche ont joué aux jeux un minimum de 2 heures (à raison d’une heure minimum par plateforme) et les 144 entrées de la grille ont été renseignées à partir d’un formulaire Google (Google Forms) référant à une base de données Excel. Le travail de collecte était supervisé par une coordonnatrice de recherche qui vérifiait la justesse et la concordance des informations entrées, ce qui assurait une double validation. Les résultats ont ensuite été traités à partir du logiciel Excel. De plus, des captures d’écran ont été prises de tous les jeux selon les catégories de la grille d’observation afin de documenter chaque point noté. Finalement, les assistants de recherche ont chacun tenu un journal de bord, ce qui leur a servi à rédiger un prérapport de recherche qui a orienté certaines pistes d’analyse du corpus.

Au final, le corpus est constitué à 9,6 % de titres sortis entre 2011 et 2014, 37,3 % entre 2015 et 2018 et 53,0 % entre 2019 et 2022. Le classement de l’ESRB est « Pour tous » (Everyone) pour 89,6 % des jeux, « 10 ans+ » pour 6,4 % et « Adolescents » pour 4,0 %. Dans les jeux présents sur Google Play Store, 28,9 % sont approuvés par les enseignants contre 71,1 % qui ne le sont pas. L’âge ciblé annoncé sur le Google Play Store pour les jeux « approuvés par les enseignants[1]» varie grandement de « jusqu’à 5 ans » à « tous âges » en passant par « 6 à 8 ans », « jusqu’à 8 ans », « jusqu’à 12 ans », etc. Quant à l’App Store, l’âge ciblé annoncé (pour les mêmes jeux) est de « 4 ans+ » pour 81,5 % des jeux, « 9 ans+ » pour 12,4 % et « 12 ans+ » pour 6,0 %. Les genres de jeux du corpus sont très variés et sont répartis de la façon suivante selon les catégories du Google Play Store : jeux de stratégie (2,1 %), course (2,9 %), rôles (3,3 %), aventure (6,3 %), arcade (7,1 %), action (7,9 %), casse-tête (13,3 %), jeux occasionnels (17,1 %), simulation (17,9 %) et éducatifs (18,3 %) (les résultats sont semblables sur l’App Store, avec l’ajout de la catégorie « famille » à 20,7 % au lieu de « éducatifs »). Tableau 1 - Genres vidéoludiques des jeux retenus selon la sous-catégorisation du Google Play Store

Présentation et analyse des résultats portant sur les mécaniques persuasives et de JHA

Comme le modèle d’affaire des jeux mobiles gratuits est basé en grande partie sur la collecte de données personnelles et la diffusion de publicités ciblées, nous avons colligé une grande quantité d’informations sur ces deux sujets au sein du corpus. Cependant, dans le cadre limité de cet article, ces résultats ne seront pas présentés en détail pour se concentrer sur les mécaniques persuasives et de JHA. Néanmoins, nous pouvons confirmer l’existence de cette infrastructure techno-économique où des données sont collectées sur les comportements en ligne des enfants et où des publicités sont diffusées sur les plateformes de jeux (bannière, vidéos ou même jeux entièrement publicitaires), souvent en contrevenant à la législation québécoise de protection des mineurs. Par ailleurs, des possibilités de microtransactions ont été observées dans 92,4 % des jeux du corpus ; 32,1 % possèdent du contenu supplémentaire payant et 55,0 % ont une boutique permanente où les items ou actions à vendre sont mis en valeur. La collecte de données, la diffusion de publicités et les microtransactions sont ainsi largement présentes dans ces jeux pour enfants, y compris dans des jeux pour tout-petits. Tableau 2 – Types de microtransactions observées En ce qui concerne le design des jeux, nos résultats concordent avec ce modèle d’affaires qui implique une connexion la plus longue possible puisque de nombreuses stratégies persuasives sont observées dans le corpus. D’abord, plusieurs mécaniques de jeux sont basées sur le renforcement positif. Cette première observation n’est pas étonnante puisque les jeux vidéo sont largement basés sur les récompenses afin de faire comprendre les mécaniques, susciter l’engagement, procurer du plaisir, etc. Ainsi, dans notre corpus, 34,5 % des jeux ont des récompenses à la performance, c’est-à-dire qu’une gratification est offerte lors d’actions réussies. Plusieurs principes éducatifs sont d’ailleurs basés sur ce principe, ce qui démontre que la stratégie peut être utilisée dans des contextes positifs pour les enfants. Toutefois, 46,5 % des jeux présentent aussi une expérience de jeu dynamique où les gains sont nombreux et très aisés à obtenir en début de jeu puis deviennent de plus en plus difficiles à gagner au fur et à mesure des avancées (ex. : Blob Hero (Rollic Games, 2022) ; My Talking Tom Friends (Outfit7 Limited, 2020). Cette stratégie a été qualifiée d’addictive dans des recherches précédentes, puisqu’elle encourage le désir de progression et la pratique plus longue afin d’atteindre les récompenses ou d’augmenter de niveau (Klemm et Pieters, 2017).

Plusieurs autres gratifications sont ajoutées sous forme de cadeaux qui ne servent pas à récompenser les réussites de l’enfant, mais plutôt à le « gâter » afin de le garder intéressé au jeu. Par exemple, 25,3 % des jeux du corpus offrent un ou des cadeaux de bienvenue (dès la première entrée en jeu) et 41,4 % des jeux offrent une rétroaction audiovisuelle très forte tel que des confettis, des ballons ou même des pièces de monnaie animées dans différents types de contextes. Cette stimulation n’est pas nécessairement liée à la performance et plusieurs jeux exagèrent les avancées de l’enfant ou la simple apparition d’un cadeau par des animations surchargées. De plus, 44,6 % des jeux offrent des cadeaux à intervalles fixes, ce qui encourage l’enfant à rester afin d’obtenir son cadeau. De manière générale, les récompenses sont nombreuses et fréquentes pour capter les jeunes joueurs et joueuses et les conditionner par renforcement positif à demeurer connectés à l’application mobile : « At a basic level, video games which offered frequent rewards and fewer obstacles provided higher levels of motivation to play among gamers » (Griffiths et Nuyens, 2017, p. 274).

Cette stratégie persuasive du renforcement positif fonctionne également de manière négative en se basant sur le biais cognitif de l’aversion à la perte. Ce biais stipule que le désir de ne pas perdre une possession est plus fort que la perspective de gagner quelque chose de nouveau. Cette aversion à la perte est souvent exploitée dans les jeux mobiles, car elle a un pouvoir plus persuasif que les récompenses positives (Hamari et al., 2014) : par exemple, dans le jeu My Dear Farm (Hypebeard Inc., 2022), une récolte doit être faite dans un intervalle de temps précis, au risque de limiter les ressources et donc la progression en jeu. Cette simple mécanique a pour effet d’inciter l’enfant à se reconnecterau jeu au moment précis où les légumes sont « mûrs ». Cette tactique est largement utilisée avec les récompenses de connexion quotidienne (une connexion par jour = une récompense) pour favoriser le développement d’habitudes de connexions fréquentes au jeu afin de ne pas perdre les cadeaux – cadeaux pour lesquels les enfants ont une excitation et un désir très grands (ex. : Baby Dragons : Ever After High™ (Mattel, Inc., 2016), Hello Kitty World 2 (Access Bright Japan, 2020)).

Cette vulnérabilité des enfants dont tirent parti de nombreux jeux du corpus est également exploitée dans d’autres contextes. Par exemple, 14,5 % des jeux du corpus présentent des récompenses à durée limitée et 24,5 % des jeux observés ont une boutique à durée limitée (certains items ne sont en vente que pour un court laps de temps). Ce temps limité augmente le sentiment d’urgence d’avoir à être présent en jeu au bon moment afin de ne rien manquer ou de dépenser sur-le-champ pour ne pas risquer de perdre des items désirés. De manière similaire, 23,7 % des jeux présentent une satiété des récompenses, c’est-à-dire une limite qui empêche les enfants d’accumuler des récompenses supplémentaires. Ils doivent attendre avant de pouvoir recevoir une nouvelle récompense, l’objectif étant d’inciter à payer pour ouvrir plus rapidement les récompenses (et ne pas perdre des récompenses à venir possiblement plus avantageuses) (ex. : Pocket Champs : 3D Racing Games (Madbox, 2021), Sonic Forces – Racing Battle (SEGA, 2017)).

Dans 24,5 % des jeux, un système d’énergie est aussi présent, ce qui limite les actions. En effet, ce type de système de jeu accorde un certain nombre de points d’énergie qui sont dépensés lors d’actions en jeu : une fois les points réduits à zéro, l’enfant doit attendre la régénération de son énergie (cooldown) pour poursuivre le jeu. Ce temps d’arrêt forcé peut être très frustrant lorsque le jeu est captivant : des points d’énergie sont alors systématiquement offerts à la vente, ce qui stimule la dépense, ou en échange du visionnement de publicités. Tableau - Mécanismes persuasives associées aux ressources Tableau 4 - Mécanismes persuasives associées aux récompenses Chez l’enfant, l’exploitation de cette stratégie devient encore plus problématique puisque la capacité de différer la satisfaction de ses désirs est une étape complexe de la maturité. Dans le corpus, 11,7 % des jeux exposent les items et gains qui auraient pu être gagnés : l’espoir d’obtenir cette récompense à un prochain essai (near misses) (ex. : My Best Friend Bucky (Interactive Moolt DTv, 2017), Fluffy Fall (WHAT (games), 2018)) encourage alors une pratique intensive du jeu, ce qui a été largement documenté dans les études sur les JHA (Côté et al., 2003 ; Chase et Clark, 2010 ; Clark et al., 2012 ; Larche et al., 2017). Afin de tirer profit de cet effet compulsif, 53,4 % des jeux du corpus proposent à l’enfant de visionner des vidéos publicitaires en échange de nouvelles récompenses.

En fait, toute la publicité est basée sur cette création de désirs, raison pour laquelle la loi québécoise encadre rigoureusement la publicité pour enfants. Par exemple, l’adresse directe à l’enfant est interdite (Loi sur la protection du consommateur. RLRQ, c. P-40.1), car cette stratégie rhétorique est trop forte auprès des petits qui n’ont pas encore la maturité de se distancier face à une sollicitation directe dirigée à leur intention. Pourtant, 42,9 % des jeux utilisent les notifications poussées (push notifications) directes pour inciter les enfants à se reconnecter au jeu, souvent en personnalisant l’adresse par un personnage en jeu qui a « besoin d’aide » ou qui demande de « continuer de jouer avec lui » (ex. : Learning games for toddlers 2+ (Bimi Boo Learning Games, 2016), LEGO® Tower (NimbleBitLLC, 2019), Bubbu – My Virtual Pet Cat (BUBADU information technology Ltd., 2015)). Il est aisé pour les jeunes de se sentir concernés par la sollicitation, d’être empathiques envers les personnages, de répondre à la demande et de se reconnecter au jeu.

Afin de stimuler le retour de l’enfant en jeu, d’autres stratégies sont exploitées. Par exemple, plusieurs jeux du corpus s’articulent autour de mécaniques de ressources, c’est-à-dire une jouabilité où le jeune doit gérer des ressources, les accumuler, les consommer, les vendre, etc. Ces ressources sont souvent récoltées en jeu, ce qui constitue une activité ludique importante et relativement commune aux jeux vidéo. Dans notre corpus, la récolte intensive (grinding), qui consiste en une action répétée à de nombreuses reprises pour accumuler un nombre désiré d’items, est présente dans 40,5 % des jeux du corpus. Habituellement, la quantité nécessaire d’items à récolter augmente exponentiellement au fur et à mesure de l’expérience en jeu. Or, comme mentionné précédemment, cette difficulté croissante peut intensifier la pratique du jeu (Klemm et Pieters, 2017). Dans 24,9 % des jeux, cette collecte est en plus opérée par intervalles, c’est-à-dire qu’elle est limitée par un minuteur. En outre, 32,5 % des cas observés attribuent des items de manières aléatoires[2], ce qui stimule encore davantage la pratique intensive afin d’obtenir les items désirés.

Un autre moyen d’inciter l’enfant à jouer plus longtemps est par les quêtes. Dans le corpus, 40,0 % des jeux sont basés sur des quêtes à accomplir. Ce type de jouabilité est aussi très commun dans le domaine vidéoludique et, comme pour les récompenses, les quêtes peuvent être utilisées dans des contextes positifs pour l’enfant. En accomplissant des actions dans un contexte de quêtes à réussir, il comprend bien sa progression et est motivé à poursuivre puisque des récompenses agrémentent sa séance de jeu. Toutefois, 14,4 % des jeux ont des quêtes rétroactives, soit des missions dont certaines actions ont déjà été réalisées précédemment par les enfants, ce qui veut dire qu’une partie de la quête est déjà complétée dès son annonce. L’effet persuasif repose sur la prémisse que l’attribution d’une quête déjà amorcée a plus de chance d’être complétée par les joueurs et les joueuses afin de ne pas perdre les gains liés à l’avancée.

Plus encore, la présence de quêtes quotidiennes dans 21,7 % des jeux, donc de missions avec récompenses potentiellement différentes à chaque jour, favorise une connexion régulière au jeu et le développement d’une habitude, au risque d’une grande frustration si l’enfant n’a pas l’autorisation parentale de se connecter tous les jours. D’ailleurs, 45,4 % des jeux du corpus annoncent des récompenses ou des quêtes à venir, publicisant ces stratégies persuasives et stimulant ainsi encore davantage le désir de revenir régulièrement au jeu. Tableau 5 - Mécaniques persuasives associées à la structure du jeu Ce désir peut être d’autant plus grand pour les enfants qui développent un grand attachement émotionnel envers les univers fictionnels et les personnages à travers lesquels ils peuvent se projeter, surtout lorsque les jeux sont basés sur des franchises connues (jouets, émissions, films, etc.). Si cet attachement peut, encore une fois, être positif pour motiver les enfants, il peut également être exploité pour les capter au sein du jeu. Par exemple, 63,0 % des jeux du corpus utilisent la mécanique de la collection, soit l’accumulation de tous les items d’une série, tous les accomplissements (achievements) du jeu, etc. Or, la volonté de « compléter la collection » peut pousser à la pratique intensive du jeu, surtout chez l’enfant qui a des affects très forts envers les personnages du jeu. Plus encore, cette mécanique de collection combinée à une mécanique aléatoire (ex. : un coffre à ouvrir ou une roue de fortune à tourner) peut devenir particulièrement addictive puisque le désir d’obtention d’un item « par chance » peut pousser à des comportements compulsifs jusqu’à l’obtention de la collection complète. Ce risque d’une compulsion est démultiplié par la simple stratégie de rendre certains items très rares ou difficiles à obtenir. De plus, en augmentant progressivement la difficulté d’obtenir des récompenses dont la valeur est aléatoire, le désir d’obtenir ces récompenses risque de croître, ce qui favorise aussi un comportement compulsif. Parmi les titres faisant usage de ces mécaniques se trouvent les jeux Minion Rush : Running Game (Gameloft, 2013), Barbie™ Fashion Closet (Mattel, Inc., 2017) et PAW Patrol Rescue World (Budge Studios, 2021).

De manière générale, les récompenses aléatoires à des moments variables et imprévisibles encouragent une pratique plus intensive du jeu : l’indétermination du contenu et du moment où apparaîtra un cadeau a un pouvoir persuasif plus grand que les récompenses prévisibles pour l’enfant et incite à jouer plus longtemps « au cas où une surprise apparaîtrait » (Griffiths et Wood, 2000). Les études en psychologie comportementale démontrent en effet que les récompenses aléatoires sont plus addictives : « Random rewards motivate players to engage in an activity with persistent effort to obtain a desired item » (Legner et al., 2019, p. 498). Dans notre corpus, 16,0 % des jeux offrent des cadeaux à intervalles aléatoires, combinant alors les effets addictifs du hasard à l’aversion à la perte (ex. : Masha and the Bear Soccer game (Hippo Kids Games, 2018), Master Doctor 3D (Alictus, 2022) et Dessert DIY (CrazyLabs LTD, 2022)). L’aléatoire devient particulièrement problématique pour les enfants à cause de l’habitude à la part de hasard dans le jeu lorsqu’il est systématiquement associé à des récompenses.

Malgré les effets potentiellement nuisibles, le hasard est surutilisé dans les jeux pour enfants, notamment par le biais des coffres à butin. Si ces coffres sont désormais décriés, voire interdits dans certaines juridictions[3], ils demeurent très présents dans les jeux pour enfants puisqu’ils ont été observés dans 39,0 % des jeux de notre corpus. Bien que nommé « coffres » à butin, le terme est généralement utilisé pour désigner tout contenant dans lequel se trouvent des récompenses inconnues des joueurs et des joueuses. Différents types de coffres à butins existent (payant ou non, avec ou sans mise, etc.) et peuvent offrir des items purement esthétiques ou des avantages en jeu. Contrairement aux JHA, tout coffre à butins comporte un prix, mais les gains obtenus ne peuvent être légalement retirés (payout) de l’univers de jeu. Par ailleurs, certains coffres à butin sont associés à une annonce des récompenses qui auraient pu être obtenues si un autre choix avait été fait (ex. : dévoiler les cadeaux qui n’ont pas été sélectionnés par l’enfant). L’exploitation du biais de la quasi-victoire encourage l’enfant à essayer à nouveau jusqu’à l’obtention de la récompense désirée. Plusieurs études démontrent la ressemblance entre les conditions de fonctionnement des coffres à butins et la définition des JHA (Drummond et Sauer, 2018 ; Brooks et Clark, 2019 ; Nielsen et Grabarczyk, 2019 ; Zendle et Cairns, 2019 ; Zendle et al., 2020). Ainsi, plusieurs similarités béhaviorales ont été relevées entre les coffres à butin et les JHA puisqu’ils tirent profit de biais cognitifs également utilisés dans le gambling « traditionnel » (illusion du parieur, illusion de contrôle, etc.) (Nielsen et Grabarczyk, 2019).

À cet égard, afin d’étudier la présence de mécaniques de JHA au sens strict, quatre critères d’évaluation ont été établis pour l’analyse du corpus : 1) Présence d’une « mise en argent » ou échange d’un item de valeur ; 2) Issue du jeu ou obtention du prix basée sur le hasard ; 3) Impossibilité de reprendre la mise placée ; 4) Recours à des représentations propres aux JHA.

Pour ce qui est du premier critère, 17,7 % des jeux y répondent de deux manières : soit par une mise avec de la monnaie en jeu (in game currency) ou avec un item difficile à obtenir, soit par une mise sous forme de visionnement de publicités : ce temps d’attention de l’enfant est rentable pour l’entreprise et équivaut à une mise en argent. Dans la majorité des cas, les deux possibilités sont offertes à l’enfant, lui donnant ainsi toujours le choix de dépenser ses gains en jeu ou de regarder des vidéos publicitaires pour parier. Plus encore, la monnaie en jeu peut être achetée en boutique pour de l’argent, n’ajoutant qu’une étape supplémentaire au pari. Ce passage vers la boutique peut lui-même être sujet à des stratégies persuasives précédemment présentées (offres limitées, offres « exclusives », etc.) et brouille encore davantage la frontière entre le jeu fictionnel et le JHA réel. De plus, les items de valeur qui peuvent être misés sont obtenus après être longuement restés en jeu, ce qui pousse à de longs temps de connexion rentables pour la compagnie. Au final, la mise est monétaire ou attentionnelle et fait gagner de l’argent aux développeurs, au détriment de l’enfant. En ce qui a trait au troisième critère, des 17,7 % des jeux qui proposent des mises, 100,0 % (soit les 44 relevés) n’offrent pas la possibilité de reprendre la mise placée.

Pour le deuxième critère, si la présence de hasard dans le jeu n’est pas mauvaise en soi puisque plusieurs types de jouabilité en dépendent et peuvent être positifs pour l’enfant, la combinaison d’une mécanique de hasard à une récompense devient problématique puisque le cadeau n’est pas obtenu à la suite de l’enfant, mais simplement de manière algorithmique sans agentivité possible. Soumis aux aléas du hasard, l’enfant est plus sujet à des biais cognitifs tels que la quasi-victoire et l’illusion du parieur : en d’autres mots, sa seule jouabilité possible est d’espérer obtenir la récompense désirée.

En ce qui concerne le dernier critère, 19,3 % des jeux du corpus présentent une imagerie propre aux JHA, principalement sous la forme d’une roue de fortune, mais également de cartes à jouer, de dés, de machines à sous, de cartes à gratter, etc. Ces représentations sont en soi problématiques, car elle favorise une banalisation des JHA, voire une normalisation chez un jeune public à qui les messages de santé publique ne sont pas communiqués (ex. : les risques associés à ce genre de jeu).

Finalement, parmi les 249 jeux observés, 7,6 % (19) des jeux répondent à l’ensemble de ces critères. Parmi les exemples relevés se trouvent des jeux tels que Pocket Champs : 3D Racing Games (Madbox, 2021) où l’issue de la partie et des récompenses repose sur le « hasard » et dont la progression des joueurs et joueuses s’appuie sur une roue de fortune. Si ce pourcentage paraît relativement peu élevé, la prévalence des mécaniques problématiques augmente lorsque les critères sont élargis afin d’inclure le design persuasif exploitant les structures et les biais cognitifs spécifiques aux JHA. Cette convergence du design des jeux mobiles gratuits avec les JHA est observable via plusieurs résultats précédemment présentés. La présence de telles mécaniques semble avoir peu d’influence sur le classement ESRB et iOS attribué à ces titres. Parmi les 19 jeux répertoriés qui répondent de manière stricte aux quatre critères des JHA, 16 portent la cote « Enfants et Adultes », 1 présente la classification « Enfants et Adultes 10 ans + » et 2 portent la cote « Adolescents ». Plus encore, parmi ces 19 mêmes jeux, 17 sont classifiés « 4 ans+ » sur l’App Store et les deux autres, « 9 ans+ ». Force est de constater que la loi sur les JHA n’est pas prise en compte dans la classification des jeux pour enfants, même lorsqu’est prise en considération une définition restreinte des JHA.

Discussion : comprendre les résultats à l’aune des effets sur le jeune public

À la lumière de cette présentation et d’une brève analyse des résultats, nous pouvons affirmer que des mécaniques persuasives et de JHA sont bel et bien utilisées dans les jeux mobiles pour enfants. Le phénomène n’est pas marginal et est loin de se limiter à quelques entreprises pouvant être qualifiées de délinquantes ou de récalcitrantes face à l’obligation de se conformer aux lois. Ces mécaniques sont largement utilisées dans les jeux pour un jeune public, et ce, malgré les risques associés à cette normalisation des JHA (King, 2018).

Plus encore, le fait que les récompenses aléatoires puissent apparaître à des moments aussi aléatoires augmente l’attractivité du jeu : au contraire des casinos où l’adulte sait que la machine à sous est toujours présente, dans plusieurs jeux, l’enfant ne connaît pas à l’avance quand le coffre ou la surprise apparaîtra. L’effet persuasif est d’ailleurs plus fort lorsque les récompenses variables et fixes sont aussi offertes à des intervalles variables et fixes : « Both fixed and variable ratio schedules elicit high rates of responding and contribute to continued engagement because players will cyclically acquire one reward type and then work toward acquiring the other » (Flayelle et al., 2023, p. 4). La combinaison de ces stratégies est particulièrement addictive, car celles-ci activent des zones précises du cerveau liées entre autres à la récompense et aux réponses biochimiques liées à la dopamine : « Working with these mechanisms needs careful balancing, as the application of rewards plays a major role when it comes to addiction » (Klemm et Pieters, 2017, p. 85).

Par ailleurs, comme les récompenses sont nombreuses et liées à de courts événements, que ce soit dans les jeux gratuits ou les JHA, le risque de développer un comportement problématique est aussi plus grand :

A rapid event frequency and short event duration has been shown to increase gambling behaviour because the loss period is brief so the player has little time to reflect on losses before a new game begins (Delfabbro and Winefield 1999). The fact that video games are structurally similar to gambling slot machines in terms of payout interval also enables a player to reinvest the rewards earned in the game into more video game playing. (King et al., 2009, p. 102)

Toutes ces stratégies, parfois qualifiées de « slotification » (slot machines) des jeux (Browne, 2020), misent à la fois sur le pouvoir attractif des jeux vidéo et des JHA, rendant même la distinction entre les deux difficile, voire impossible à faire.

En effet, notre étude démontre que les formes d’actualisation des mécaniques de JHA sont largement imbriquées à la jouabilité et l’univers ludique des jeux mobiles, se combinant même à des mécaniques de jeu positives pour le développement et le bien-être de l’enfant. Au contraire des machines à sous et des tables de poker clairement associées aux JHA, le type d’intégration des mécaniques persuasives et de JHA dans les jeux mobiles pour enfants est fictionnalisé au sein d’un univers qui n’est pas associé aux casinos et autres loteries. Les frontières sont entièrement brouillées entre le jeu et le JHA, tout comme le sontt la monnaie en jeu (in game currency) et l’argent réel, ce qui risque encore plus de faire perdre le fil des montants réellement dépensés. « The harm, if any, comes from the games’ immersive and addictive qualities, from normalising and romanticising gambling or by making players more vulnerable to becoming problem gamblers » (Browne, 2020, p. 9).

Si les risques ont été identifiés chez les adultes, l’enfant est encore plus fragile, car il est en apprentissage sociocognitif : « Children and young people may even be more susceptible to the negative effects of some forms of game design because they are still developing » (van der Hof et al., 2022, p. 6). L’enfant est en plus attaché émotionnellement à ces univers mignons, amusants, attrayants, etc. qui le sécurisent et le mettent en confiance. Rien ne lui indique le danger potentiel de certaines mécaniques du jeu. L’esthétique, la narration et les personnages sont tous conçus pour s’adresser à lui, l’intéresser au jeu le plus longtemps possible et l’encourager à effectuer différentes actions qui peuvent lui être nuisibles.

En ce sens, la définition des JHA doit être élargie dans le contexte d’une « gamblification » des jeux, particulièrement ceux pour enfants. Macey et Hamari (2022) précisent que la « gamblification » « incorporates two main aspects : affective (employing cultural values/signifiers of gambling) ; and effective, (employing gambling games and activities) » (p. 10). La part affective de la « gamblification » éclaire particulièrement bien le potentiel persuasif de son utilisation chez un jeune public. En effet, pour Macey et Hamari (2022), la « gamblification » affective se divise en deux sous-catégories. La première est qualifiée d’« émotive » et renvoie à l’imagerie et au langage des JHA qui sont utilisés pour suggérer certaines émotions : l’excitation liée à l’obtention d’un gain en constitue un exemple, excitation qui peut être amplifiée par une surstimulation audiovisuelle, des cadeaux aléatoires, des récompenses fixes, etc. La seconde sous-catégorie de la « gamblification » affective est appelée « normalisante », c’est-à-dire que la présence d’éléments propres aux JHA dans divers contextes normalise ce type de jeu, jusqu’à le rendre transparent : une activité, comme un jeu vidéo, devient ainsi un moyen de promouvoir les JHA en rendant banales les mécaniques et les imageries qui y sont liées, même dans les jeux pour enfants. Capitalisant sur le pouvoir affectif de la « gamblification », surtout auprès des tout-petits, les développeurs de jeux en oublient le bien-être et même la sécurité des enfants pour tirer des profits.

Alors que les méfaits associés à la dépendance aux JHA en ligne ont crû dramatiquement depuis la pandémie chez les joueurs et les joueuses adultes (Biron et Fournier, 2023), trop peu d’encadrement et d’application des lois existantes viennent protéger adéquatement les jeunes joueurs et joueuses. Jusqu’à présent, l’attention médiatique, parentale et même scientifique s’est plutôt orientée vers certaines thématiques (ex. : violence) ou certaines représentations (ex. : sexualisation), sans s’inquiéter suffisamment des mécaniques présentes en jeu (Klemm et Pieters, 2017) ni du modèle d’affaires problématique soutenant les jeux mobiles gratuits (van der Hof et al., 2022). La collecte de données et la publicité ciblée sont très préoccupantes, tout comme l’est la présence de mécaniques qui incitent à une pratique intensive ou qui stimulent les mêmes réactions biochimiques que les JHA.

Considérant les objectifs poursuivis par les entreprises, cette façon de conditionner les comportements présente de nombreux enjeux éthiques et de santé publique, particulièrement chez les tout jeunes joueurs et joueuses. L’usage de mécaniques de JHA risque d’accroître les problématiques addictives en normalisant ce genre de jeux dans la vie des enfants – parfois âgés que de deux ou trois ans. Le jeune public, exposé jour après jour aux JHA, s’habitue ainsi à ces mécaniques en répondant particulièrement bien aux stratégies persuasives. Or, les études actuelles démontrent que la pratique de JHA à un jeune âge accroît les risques de développer une dépendance à l’âge adulte (King et al., 2010 ; Shead et al., 2010 ; Emond et Griffiths, 2020). À une époque où les enfants n’ont jamais été autant protégés (parcs, voitures, vélos, etc.), il est inconcevable que les adultes ne veillent pas mieux sur ce jeune public.

Conclusion

Cette étude visait à évaluer la prévalence des mécaniques persuasives et de JHA, leurs formes d’actualisation et leurs types d’intégration dans l’expérience vidéoludique des enfants. Nous avons débuté la recherche par le constat d’une convergence idéologique, techno-économique et conceptuelle entre les jeux mobiles gratuits et les JHA, en visant à garder connectés au jeu et à faire dépenser les joueurs et les joueuses. Partant de l’hypothèse d’une « gamblification » des jeux mobiles pour enfants, nous avons constitué un corpus représentatif de 249 jeux analysés à partir de 144 variables. Nous avons ainsi pu constater, entre autres, que les mécaniques persuasives (associées aux récompenses, aux ressources et à la structure du jeu) et les mécaniques de JHA (basées sur quatre critères) sont largement présentes dans les jeux pour enfants. Diverses stratégies sont aussi utilisées afin de fusionner l’univers vidéoludique à celui des JHA, que ce soit directement avec des mises en argent ou indirectement avec toute une imagerie propre au gambling. Même si peu de jeux de notre corpus (7,6 %) utilisent les JHA au sens de la loi, une extension de la définition dans des formes actualisées propres aux jeux vidéo permet de bien saisir l’ampleur du problème : des monnaies en jeu sont utilisées (qui peuvent être achetées à la boutique), le temps d’attention de l’enfant est marchandisé (telle une « mise »), les mêmes biais cognitifs sont exploités, la mécanique de hasard est combinée avec des récompenses, etc.

Un renforcement des lois et de leur application devrait être fait, d’autant plus que les enfants sont légalement très peu protégés dans le domaine vidéoludique (Kidron et al., 2018 ; Reyes et al., 2018 ; Melzer et al., 2021 ; Radesky et al., 2022). Pourtant, l’usage d’un design visant à influencer négativement le comportement dans des jeux pour enfants contrevient aux droits des enfants tels que définis par l’Organisation des Nations Unies : « In relation to behavioral design and children’s welfare, the rights of children to health, play, data protection, and protection against economic exploitation are particularly relevant » (van der Hof et al., 2022, p. 2). Nous sommes alors toutes et tous collectivement responsables de faire respecter leurs droits.    


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Notes

[1] ^ Bien que la cote « adolescents » de l’ESRB (utilisé sur le Google Play Store) renvoie à une catégorie « 13 ans+ », nous avons conservé ces jeux, car ils sont cotés moins de 13 ans dans l’App Store.

[2] ^ En informatique, le hasard n’existe pas puisqu’il s’agit plutôt de résultats aléatoires planifiés par programmation. Demeure néanmoins que l’effet perçu par le joueur ou la joueuse est celui propre au hasard.

[3] ^ En 2018, la commission des jeux de hasard de la Belgique a procédé à l’interdiction de tout usage des coffres à butin, que ces derniers soient offerts gratuitement ou par l’intermédiaire d’un échange monétaire. Le Royaume-Uni, quant à lui, estime que seuls les coffres à butins payants et dont les récompenses peuvent être converties en « argent réel » répondent aux critères des JHA (Lui et al., 2020).

 

 

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